Le programme Mercator de l’OMD : vers des partenariats innovants
20 juin 2017
Par Nathan Taylor, Manager, and Johanna Tornstrom, Coordinatrice, Programme Mercator, Direction du renforcement des capacités, OMDL’entrée en vigueur de l’Accord de l’OMC sur la facilitation des échanges (AFE) place certains gouvernements une nouvelle fois devant la nécessité impérative de rapidement moderniser et réformer leurs administrations douanières au cours des prochaines années. Fort heureusement, la mise en œuvre efficace des dispositions de l’AFE figure parmi les principales priorités de la communauté internationale des donateurs. Les pays concernés devraient donc bénéficier d’un large éventail de mesures d’assistance technique et de renforcement des capacités.
Offrant aux administrations douanières un appui durable et rentable depuis plusieurs décennies, l’OMD a renforcé son aide en faveur de la facilitation des échanges en lançant le programme Mercator en 2014. Conçu pour aider les gouvernements à mettre en œuvre les mesures douanières de facilitation des échanges stipulées dans l’AFE, le programme Mercator vise à renforcer les capacités des douanes sur la base d’une évaluation complète de leurs besoins et d’un plan de développement, lesquels s’inscrivent dans un modèle opérationnel orienté résultats.
Le présent article rappelle combien il est nécessaire pour les donateurs de coordonner leurs efforts en matière de renforcement des capacités, présente la valeur ajoutée de l’OMD s’agissant du soutien aux douanes, et, enfin, donne des informations détaillées sur le modèle opérationnel qui régit le programme.
De douane à douane
Nombre de partenaires de développement bilatéraux et multilatéraux ont choisi de faire de la facilitation des échanges l’une des priorités de leurs programmes d’aide. Cela s’explique par le fait que nombre d’études démontrent clairement que les échanges et leur facilitation sont générateurs de croissance économique et réduisent la pauvreté, ainsi que par l’entrée en vigueur, dernièrement, de l’AFE. La plupart des grandes banques de développement et des grands organismes de développement consacrent ainsi des ressources financières et humaines considérables à ce domaine, soutenant le renforcement des capacités, l’assistance technique et les programmes d’infrastructures dans les pays en développement.
L’accroissement du soutien apporté à la facilitation des échanges par une communauté de donateurs à la fois nombreux et hétérogènes présente un défi bien connu : toutes les parties prenantes appellent une coordination de leurs vœux, mais toutes ne sont pas toujours prêtes à « être coordonnées ». L’une des meilleures façons de favoriser la coordination dans cet environnement consiste à comprendre la valeur ajoutée propre de chaque partenaire et à en tirer parti, tout en gardant à l’esprit l’importance de l’appropriation et de la prise en mains des opérations à l’échelon national.
Au sein de cette communauté internationale complexe, l’OMD dispose d’un atout unique : sa position lui permet d’offrir une assistance de douane à douane. La création d’alliances professionnelles entre fonctionnaires et administrations ne ressemblent en effet pas aux modèles traditionnels d’experts-consultants couramment utilisés dans le cadre de l’assistance technique axée sur les échanges commerciaux. Une telle approche comporte de nombreux points positifs, dont un bon rapport coût-efficacité, la garantie d’une certaine confiance entre partenaires, et, surtout, l’assurance que les normes et standards internationaux établis par l’OMD seront respectés.
Toutefois, ce mode de fonctionnement « entre pairs » n’est pas, lui non plus, exempt de défis. Le Secrétariat de l’OMD doit trouver un équilibre entre les demandes d’expertise émanant de ses Membres et les réalités opérationnelles auxquelles ils sont confrontés chaque jour. Il doit veiller à une juste répartition de ses ressources entre ses Membres, tout en garantissant des prestations dont la qualité soit conforme aux normes de l’OMD. Par ailleurs, il doit maintenir le contact avec ses Membres tout en ne disposant pas de la même présence sur le terrain que d’autres partenaires de développement.
Consciente de l’atout unique dont elle dispose, mais aussi des défis à relever, l’Organisation a décidé de changer la façon dont elle aborde le renforcement des capacités. En 2016, une véritable révolution s’est produite, avec le basculement d’une aide basée sur les activités – que l’on mesurait souvent au moyen du nombre de missions accomplies – vers une aide axée sur les résultats. Cette nouvelle forme d’appui s’inscrit dans une gestion de projets plus disciplinée, avec des plans de mise en œuvre pluriannuels définis à l’échelon national, dont on suit l’exécution à l’aune de résultats et d’indicateurs de performance définis.
Modèle opérationnel
Étant donné que l’entrée en vigueur de l’AFE a créé une sorte d’urgence à réformer et à moderniser les douanes et en prévision d’une hausse des demandes d’aide en matière de renforcement des capacités, l’OMD a mis sur pied un nouveau groupe de conseillers stratégiques : les conseillers du Programme Mercator (CPM).
Il s’agit de cadres des douanes expérimentés destinés à soutenir des administrations dans la mise en œuvre des dispositions de l’AFE sur la base des bonnes pratiques et normes internationales. Outre leurs connaissances de pointe et leur expérience, les conseillers ont à leur disposition la large palette d’instruments et d’outils de l’OMD pour mener leurs missions à bien. En avril 2017, on comptait déjà une quarantaine de conseillers du Programme Mercator représentant pays développés, pays en développement et pays les moins avancés.
Le modèle opérationnel du programme se fonde sur un dispositif bien spécifique au niveau national : le CPM qui est désigné afin de superviser l’application d’un plan de développement pluriannuel doit maintenir un dialogue constant avec l’administration bénéficiaire. Cette méthode permet d’offrir un appui plus stratégique, méthodique, cohérent et rapide. Dès 2016, elle a été testée en Afghanistan, en Éthiopie et en Sierra Leone, avec l’intervention de conseillers du Programme Mercator représentant les autorités fiscales sud-africaine, swazilandaise et ougandaise.
Les conseillers, au moyen de contacts multiples dans le pays, se font une image claire du contexte dans lequel opère l’administration, de ses principales parties prenantes internes et externes, ainsi que des activités des autres partenaires de développement. Ils sont le « visage » de l’OMD, veillant à un engagement plus durable en faveur du processus de réforme et de modernisation, tout en se présentant comme des collègues de confiance issus de la communauté mondiale des douanes. Ce modèle opérationnel a eu une conséquence inattendue, mais bénéfique : l’émergence d’une « coopération sud-sud ». Ainsi, l’Afghanistan, sans accès à la mer, a pu grandement s’inspirer, pour son programme de modernisation, de l’Ouganda, autre pays en développement totalement enclavé. L’Éthiopie, quant à elle, a pu se convaincre de l’importance qu’il y a à investir dans le leadership et le développement du management en voyant l’expérience du Swaziland, que lui a communiquée son conseiller lors d’une conversation stratégique sur le développement organisationnel.
Le modèle opérationnel déploie toute sa puissance lorsque, à la contribution du conseiller du Programme Mercator (CPM), s’ajoutent celles du groupe de conseillers techniques et opérationnels (CTO) de l’OMD et d’autres experts reconnus. Les CPM apportent une vision stratégique de la dynamique de la facilitation des échanges dans un pays, tandis que les CTO offrent des conseils techniques ciblés sur des mesures spécifiques, telles que la gestion des risques ou le concept d’opérateur économique agréé. En fait, le conseiller du Programme Mercator doit s’assurer que ces conseils techniques arrivent au bon moment, soient communiqués aux bonnes personnes, et s’intègrent dans un programme plus large de réforme et de modernisation. Plus important encore, leur compréhension de la dynamique interne et des personnalités au sein de l’administration douanière bénéficiaire de l’aide jette les bases idéales pour une assistance technique hautement efficace.
Le point de vue des Membres
La participation au programme requiert de la part des Membres de l’OMD de solides compétences en gestion de projet, compétences qu’ils peuvent désormais acquérir au moyen du nouveau programme de formation à la gestion de projet que l’OMD a mis au point et propose à tous. Cela est particulièrement pertinent pour les points de contact nationaux (PCN) désignés dans le cadre de la mise en œuvre de l’AFE. Ces fonctionnaires ont pour tâche, en effet, d’intégrer toute l’aide des donateurs et toutes les initiatives nationales dans un cadre global de mise en œuvre de l’accord qui soit stratégiquement solide et suive une séquence logique. Un des rôles des conseillers du Programme Mercator est donc de contribuer activement au renforcement des capacités des points de contact nationaux et des services chargés de moderniser la douane, que ce soit en matière de gestion de projet, de coordination, de suivi ou d’évaluation.
A titre d’exemple, en Sierra Leone, près d’une douzaine d’experts dans des domaines très variés de la planification stratégique, de l’évaluation, de la gestion des risques et du contrôle a posteriori ont soutenu le programme de réforme et de modernisation de l’autorité fiscale. Le rôle de gestion et de supervision du conseiller du Programme Mercator en Sierra Leone a été déterminant s’agissant de maintenir une communication soutenue entre l’OMD et l’autorité fiscale, de pérenniser l’engagement des cadres et d’assurer leur adhésion au programme de réforme, et, enfin, d’inscrire l’aide de l’OMD dans l’environnement général d’une réforme soutenue par plusieurs intervenants. De son côté, le point de contact national de l’autorité fiscale est en train de renforcer ses capacités en vue de gérer efficacement l’apport de l’OMD et d’autres organismes dans le cadre de la mise en œuvre du plan stratégique de son administration.
On n’insistera jamais assez sur l’importance d’une démarche collégiale, de douane à douane. Lorsque les relations sont solides, collégiales et empreintes de confiance, le retour d’informations sur la qualité de l’aide octroyée par l’OMD, ou tout autre organisme, est beaucoup plus honnête et franc. Les relations douane à douane étant bien établies, les Membres de l’OMD se montrent en outre très ouverts sur leurs besoins techniques précis. À cet égard, le programme Mercator pourrait permettre à l’OMD de jouer le rôle d’intermédiaire impartial qui aurait à cœur le respect des normes internationales et la défense des intérêts de ses Membres, tout en garantissant une utilisation optimale des ressources des partenaires de développement.
Conclusion
En tant que centre mondial d’expertise pour les questions douanières, l’OMD est bien placée pour fournir une assistance durable et rentable à ses Membres et s’assurer qu’ils sont en mesure de faire le meilleur usage possible de toute la palette d’aides mises à disposition par les partenaires de développement. Les administrations douanières qui désireraient obtenir de plus amples informations ou rejoindre le programme Mercator sont invitées à prendre contact avec la Direction du renforcement des capacités de l’OMD.
En savoir +
capacity.building@wcoomd.org