La Douane du Guatemala sous le signe du renouveau
20 juin 2017
Par Mgter. Werner Ovalle, Directeur de la Douane du Guatemala, et María Lucía Soto (MBA), Conseil guatémaltèque des usagers des transports internationauxL’année 2015 a laissé une empreinte indélébile dans l’histoire du Guatemala, avec l’arrestation d’un grand nombre de responsables politiques et fonctionnaires pour leur implication présumée dans l’affaire La Línea, vaste fraude de plusieurs millions de dollars touchant les plus hautes autorités du pays, dont l’Administration fiscale nationale (SAT).
La priorité ayant été donnée au recouvrement des recettes, les contrôles physiques des marchandises avaient augmentés, incitant les importateurs à proposer des pots de vin pour éviter de payer les droits et taxes ou se voir accorder des réductions conséquentes de ces droits. Des douzaines de fonctionnaires se partageaient ces versements illégaux.
Le scandale a terni l’image du Guatemala, mais il a également ouvert la porte au changement, en particulier au sein de la SAT où des réformes majeures ont été mises en œuvre et où un meilleur dialogue avec le secteur privé a pu être instauré.
Reprendre le contrôle et regagner la confiance
À son arrivée, la nouvelle équipe de direction de la SAT n’avait qu’une idée en tête : reprendre le contrôle du Service douanier et regagner la confiance des contribuables. Pour y parvenir, elle prit un certain nombre de mesures.
Les procédures furent réexaminées et des plans détaillés de contrôle du fret conçus et mis en œuvre avec le soutien d’organisations internationales. Ces plans prévoient les mesures suivantes :
- amélioration des processus déterminés en coordination avec le secteur privé et avec d’autres organismes ;
- enregistrements des chargements retenus par la douane ou mis sous entrepôts douaniers ;
- application de mesures de contrôle tout au long du processus de dédouanement ;
- protection des installations physiques ;
- développement d’un tableau de bord avec indicateurs et statistiques pour mieux suivre les contrôles physiques effectués sur les marchandises ainsi que les différentes phases du dédouanement.
La SAT a également été dotée de personnel nouveau, fiable et soucieux de l’éthique. Suite au scandale de corruption, plusieurs fonctionnaires ont été congédiés et arrêtés, d’autres font toujours l’objet d’enquêtes pour leur implication dans l’affaire La Línea ou dans d’autres activités illégales. Il a été demandé à l’ensemble du personnel de la SAT de se soumettre à des contrôles d’éthique sous différentes formes.
La SAT s’est également tournée vers les ministères de la sécurité et de la justice pour obtenir leur soutien dans la lutte contre la contrebande et la fraude et pour veiller à ce que les violations de la loi constatées par la douane fassent l’objet de poursuites efficaces.
De nouvelles entités ont été créées au sein de la SAT : le Département des affaires intérieures, chargé de veiller au respect de l’éthique et d’engager des poursuites à l’encontre des fonctionnaires corrompus ; le Bureau des contribuables visant à renforcer les services fournis par l’administration aux contribuables ; et le Département de la formation, chargé de renforcer et de développer les capacités du personnel.
Par ailleurs, le Conseil interinstitutionnel pour la prévention et la lutte contre la fraude fiscale et la contrebande douanière a été relancé. Présidé par la SAT, ce Conseil rassemble diverses entités publiques et privées discutant entre elles des stratégies et des actions à mener contre la fraude et le commerce illicite. Ensemble, ces entités ont développé dans ce domaine une politique nationale dont la mise en œuvre a été confiée au nouveau Département pour la fraude fiscale et la contrebande, entité elle aussi nouvellement créée au sein de la SAT. Des opérations conjointes ont également été engagées dans différentes parties du pays : contrôles dans les bureaux de douane, contrôles sur les routes, opérations coup de poing et destruction de marchandises.
Nouveau dialogue et partenariat plus étroit
Pour les entreprises participant au commerce international, il est essentiel de disposer d’un système de transport du fret qui soit souple et efficace et génère le moins de coûts possible. Tout changement influençant directement le processus d’exportation ou d’importation est donc surveillé de près. À l’arrivée du nouveau gouvernement en 2015, et donc de nouvelles équipes dirigeantes à la tête des principales administrations du pays, les représentants du secteur privé espéraient un changement favorable.
Quand les nouveaux dirigeants de la SAT ont pris leurs fonctions en mars 2016, le secteur privé a rapidement compris que le nouveau Service était intéressé par une relation plus ouverte et plus étroite avec certaines entités privées, outre son intention d’améliorer l’administration et ses mécanismes de fonctionnement en général. Les représentants du secteur privé ont tout de suite cherché à exposer au nouveau Service leurs préoccupations qui, si elles n’étaient pas nouvelles, devaient cependant être traitées de manière collective.
Pour que toutes les parties concernées puissent présenter leurs problèmes, leurs visions et leurs idées sans générer un processus de consultation trop lourd à gérer, il a été décidé de créer le « Comité pour le dialogue et la coopération entre entités publiques et privées dans les affaires douanières ». Dix-sept organismes ont rejoint ce Comité dès sa création, et deux autres ultérieurement.
Le Comité a pour objectif principal d’offrir un lieu de discussion entre les représentants du secteur public et du secteur privé sur les possibles améliorations à apporter en matière de procédures, de processus, de systèmes et d’évaluations des risques. Les parties prenantes peuvent aussi y échanger les résultats d’études ou des propositions visant à améliorer la facilitation des échanges et la transparence dans la gestion des flux.
Tous les participants à ce Comité peuvent ainsi montrer leur bonne volonté ainsi que leur intention d’améliorer les choses dans un environnement caractérisé par le respect et la coopération. Les idées émanant du Comité sont également soumises à la direction de la SAT, qui prend soin de les analyser et de définir les priorités. Le Comité se compose de trois groupes :
- un groupe de haut niveau constitué des représentants de haut rang des entités participantes, lequel se réunit deux fois par an pour examiner les progrès accomplis ;
- un groupe de travail technique, qui se réunit quatre fois par an pour discuter du plan de travail et de la manière dont il sera exécuté ;
- deux groupes coordinateurs : l’un dirigé par le Service douanier, l’autre par les entités du secteur privé ; ces groupes discutent, à leur niveau respectif, des questions soumises par leurs membres et se réunissent aussi souvent que nécessaire.
Récemment, les représentants du Comité ont travaillé ensemble sur une crise déclenchée dans l’un des principaux ports du pays. Ils collaborent également pour développer des supports de formation et dispenser des formations au personnel douanier, en plus de définir et développer les mesures s’inscrivant dans le plan de travail 2017.
Surmonter les obstacles en travaillant ensemble
Au cours de ce processus, le Service douanier du Guatemala a prouvé sa capacité de dialogue et d’ouverture lorsqu’il s’agit d’améliorer ses services. Cependant, comme tout service public, son principal défaut est son manque d’agilité, surtout quand il convient d’appliquer des priorités et de développer les projets définis dans le cadre du plan de travail commun pour 2017. Les procédures, processus et méthodes de travail ne sont pas aussi souples et efficaces que dans le secteur privé, essentiellement en raison de ressources limitées et de restrictions réglementaires.
Toutefois, même si les avis diffèrent parfois entre les représentants de la douane et du secteur privé, souvent parce que le gouvernement central a ses propres priorités, ces derniers parviennent toujours à avancer, à surmonter les obstacles tels que les lourdeurs administratives, les réglementations et l’insuffisance des ressources humaines et financières, et à travailler ensemble pour le bien du pays.
La voie à suivre
La douane n’est pas le seul organisme chargé de gérer la circulation internationale des marchandises. Il s’est avéré rapidement que d’autres organismes publics devraient être invités à rejoindre le Comité. La coordination restera confiée au Service douanier mais d’ici peu d’autres organismes assisteront aussi aux réunions.
Le défi à relever aujourd’hui est de pérenniser le dialogue. Il y a encore un long chemin à parcourir : tout d’abord produire des résultats concrets et des indicateurs permettant de mieux mesurer la transparence et la facilité pour les entreprises à faire des affaires. Toutefois, les entités publiques et privées, parties prenantes à ce dialogue, sont confiantes : elles seront bientôt en mesure d’améliorer l’environnement commercial du Guatemala, ce qui contribuera au développement économique de la nation tout entière.
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