Panorama

De la campagne à un partenariat de confiance : comment l’OMD, l’ONUDC et le secteur des compagnies maritimes unissent leurs forces pour renforcer l’intégrité de la chaîne logistique

28 octobre 2025
Par le World Shipping Council

Une analyse récente de l’Organisation mondiale des douanes (OMD), portant sur plus de 2 600 saisies de stupéfiants dans des conteneurs maritimes en 2023 et 2024, a révélé qu’environ 68 % des modes de dissimulation ont bénéficié, à un stade ou à un autre, d’une complicité interne. Ces résultats mettent clairement en lumière la nécessité de réponses publiques/privées plus intégrées, associant les pouvoirs des douanes et des forces de l’ordre à l’expertise du secteur, à la technologie et à un partage d’informations fondé sur la confiance, afin de favoriser une circulation bidirectionnelle des renseignements.

Bâtir un partenariat sur le terrain

Depuis plusieurs années, l’OMD, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et le World Shipping Council (WSC), qui est le conseil mondial de la marine marchande, unissent leurs efforts pour transformer leur compréhension mutuelle en coopération opérationnelle et en échanges concrets d’informations entre les compagnies maritimes et les autorités de contrôle sur le terrain (voir article publié dans l’édition 103 de OMD Actualités).

Dans certains pays, cette collaboration se traduit par un flux continu d’échanges d’informations entre les agents chargés de l’application de la loi et le personnel des compagnies maritimes. Ces échanges d’informations portent sur l’identité et le contexte des envois, les itinéraires et transbordements, ainsi que les irrégularités dans la chaîne de garde. Les équipes chargées des politiques du WSC et les transporteurs participants considèrent désormais ce dispositif comme une boucle d’amélioration continue : le secteur privé signale les risques et anomalies, les autorités partagent leurs retours d’expérience et les nouveaux modes opératoires, et ensemble, ils affinent les processus de ciblage et d’évaluation des risques.

Cette évolution a aussi été renforcée par les directives pratiques élaborées conjointement par l’OMD et le secteur privé. Les Directives de l’OMD sur les réponses douanières aux signalements du secteur privé propose des mesures comme la désignation d’un point de contact unique au sein des administrations douanières, la transmission rapide de retours d’expérience aux entreprises qui font des signalements, et la conduite régulière d’analyses a posteriori des incidents – autant d’étapes concrètes qui permettent de transformer les signalements en apprentissage et en prévention renforcée, sans compromettre les enquêtes en cours.

Prochaines étapes : poursuivre la boucle d’apprentissage

Dans le cadre de cette collaboration continue, les compagnies maritimes apportent également leur expertise en intervenant lors de séminaires régionaux de l’OMD à l’intention des services douaniers. L’objectif est de renforcer la compréhension commune des vulnérabilités de la chaîne logistique et d’affiner la détection des activités suspectes.

La collaboration ne cesse de se consolider. En septembre, une conférence conjointe OMD/WSC/IAPH organisée à Bruxelles a réuni des représentants des douanes, des ports, des compagnies maritimes, ainsi que des acteurs du commerce et des pouvoirs publics, autour d’un thème central : « Une réponse collective pour protéger les chaînes logistiques maritimes contre les menaces criminelles .»

Les participants ont pu découvrir les mesures mises en place pour protéger le personnel, les infrastructures, les opérations, la réputation des organisations, et plus largement, la société. Les intervenants ont insisté sur la nécessité, pour tous les acteurs de la chaîne logistique maritime de reconnaître qu’ils peuvent être concernés par la criminalité organisée, quels que soient leur rôle, leur taille ou leur localisation. Ils ont également insisté sur le fait que l’établissement d’un dialogue continu entre les parties prenantes permettrait à celles-ci d’apprendre ensemble des opérations et des besoins des autres, créant ainsi des opportunités d’améliorer leurs modèles opérationnels respectifs.

Les échanges ont mis en avant les approches qui favorisent la réussite de tels partenariats et les enseignements tirés des initiatives déjà en cours. Plusieurs intervenants ont souligné la nécessité d’organiser des discussions spécifiques entre les agences chargées de l’application de la loi et le secteur industriel afin d’identifier et de partager rapidement les informations qui apporteront une valeur ajoutée pour cibler les conteneurs contaminés et compromis. L’analyse conjointe après incident et la tenue régulière de réunions de coordination visant à partager des informations sur les questions et les préoccupations émergentes ont été présentées comme de bonnes pratiques.

Les représentants de compagnies maritimes et de ports ont également évoqué les limites de certaines mesures prises – protection du personnel, vérifications d’antécédents, procédures de licenciement – et la nécessité d’un appui des pouvoirs publics pour en accroître l’efficacité.  Enfin, les débats ont aussi porté les effets parfois inattendus de législations utiles et nécessaires en matière de confidentialité et de concurrence, qui peuvent rendre difficile l’identification et le démantèlement des réseaux criminels.

Protéger les personnes tout en sécurisant la chaîne logistique

Qui dit partenariat dit également  protection des marins et des travailleurs de première ligne qui assurent la continuité des échanges commerciaux. Le WSC et ses membres se sont toujours opposés à la criminalisation injuste des marins qui signalent de bonne foi des irrégularités. Les cadres de coopération public/privé doivent encourager le signalement de ces faits, garantir des canaux de signalement confidentiels et veiller à ce que les réponses restent proportionnées.

Au-delà des stupéfiants : un modèle applicable à d’autres menaces

Si cet article s’attache à la question des stupéfiants, le modèle de collaboration public/privé s’étend déjà à d’autres risques et régions. Il s’illustre notamment par les actions menées dans le cadre de la coopération européenne pour renforcer la sûreté portuaire et l’échange d’informations, ou encore par les initiatives conjointes de lutte contre le trafic illégal d’espèces sauvages, aux côtés des gouvernements, des organisations internationales et des ONG. Des outils pratiques, en libre accès, ainsi que des indicateurs d’alerte (« drapeaux rouges ») élaborés par des coalitions du secteur pour aider l’ensemble de la chaîne logistique à repérer et signaler ce type de trafic sont disponibles sur le site Web du WSC.

En savoir +
https://www.worldshipping.org
alarsson@worldshipping.org