Dossier: Mobiliser les partenaires

Lutter contre le trafic de drogues : comment les compagnies maritimes pourraient devenir les partenaires des douanes

21 février 2024
Par le World Shipping Council

Au cours des cinq dernières années, de nombreux services répressifs ont constaté une augmentation dramatique du trafic de stupéfiants, et des violences et problèmes sociaux associés à ce commerce. Au fil des années, les compagnies maritimes ont investi énormément de ressources dans la lutte contre le mouvement de marchandises illicites sur leurs bateaux. Ces mesures vont de l’inspection du fret à la surveillance des conteneurs grâce à des dispositifs de suivi et de repérage ou à des systèmes de capteurs qui enregistrent toute tentative d’effraction sur les conteneurs ou tout changement de température. Certains transporteurs utilisent également des outils d’analyse automatisée pour déceler les anomalies dans les informations indiquées sur les manifestes d’expédition. Bien que les membres du personnel des paquebots ne soient pas des agents des services de l’ordre, ils peuvent tout de même apporter leur aide aux douanes, à la marine, aux garde-côtes et à la police en détectant les anomalies et en faisant rapport de leurs constatations. Par contre, ils ne disposent souvent pas d’un mécanisme de communication directe avec les autorités chargées de l’application de la loi et ils doivent naviguer dans un dédale de contraintes légales afin de s’assurer que les données puissent bien être utilisées sans porter atteinte aux dispositions des différents pays en matière de protection et de confidentialité des données. Il n’existe souvent pas non plus de canal de communication formel entre les diverses agences chargées de l’application de la loi concernées.

Au cours des deux dernières années, conscients qu’il est urgent de lutter contre l’exploitation du transport maritime et de fret par les trafiquants de drogue, le World Shipping Council (WSC) et ses membres ont renforcé leur partenariat avec les douanes, les autres services répressifs et les partenaires de la chaîne logistique partout dans le monde. La réunion qui a marqué le lancement de cette coopération a rassemblé des représentants de l’Organisation mondiale des douanes (OMD), de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), de plusieurs administrations douanières ainsi que du WSC et de ses membres. Cette rencontre a été suivie d’une série d’autres activités et initiatives visant à faire connaître et à faire comprendre les objectifs, les méthodes et la manière de travailler de chacune des parties.

Un climat de confiance mutuelle s’est rapidement installé entre les partenaires, comme en atteste la participation de plusieurs membres du WSC à l’opération mondiale de lutte contre la fraude TIN CAN qui a été présentée dans un numéro précédent de ce magazine. L’opération constitue un exemple de collaboration fructueuse. Chapeautée par l’OMD et l’ONUDC, rassemblant les douanes et autres autorités chargées de l’application de la loi de 58 pays, et mobilisant des transporteurs membres du WSC, TIN CAN a donné lieu à 43 arrestations, à l’ouverture de 158 enquêtes et au retrait du marché de 98 734 kg de cocaïne et de 314 kg de cannabis.

Durant l’opération, des canaux de communication ont été mis sur pied par l’OMD entre les transporteurs et les services répressifs, et les compagnies maritimes ont pu ainsi partager des informations sur des activités suspectes.

Forts de leur expérience durant l’opération, le WSC, l’OMD et l’ONUDC ont dressé une liste de divers points d’action à mettre en œuvre, notamment :

  • Élaborer un programme de formation pour le personnel des douanes et des services répressifs en vue de mieux faire comprendre les pratiques commerciales et opérationnelles du transport de ligne, les processus d’importation et d’exportation ainsi que d’autres aspects essentiels du secteur.
  • Promouvoir l’échange de données entre les autorités et les transporteurs concernant les indicateurs de risque et les cargaisons suspectes – les données principales à échanger doivent être définies de manière collaborative et les contraintes juridiques et de sécurité doivent être clairement abordées ;
  • Normaliser les définitions et les pratiques pour les conteneurs abandonnés qui sont source de problèmes légaux, opérationnels et financiers tant pour les douanes que pour les autorités portuaires et les transporteurs.
  • Mettre au point des procédures qui permettent aux gens de mer de notifier toute activité suspectée d’être illicite tout en s’assurant qu’ils restent protégés, qu’ils ne soient pas pénalisés et/ou arrêtés et qu’ils soient traités de manière équitable.

Le WSC a également apporté sa contribution aux Directives sur la coopération entre les douanes et les autorités portuaires élaborées par l’OMD et l’International Association of Ports and Harbors (IAPH) ; il travaille d’ailleurs à la rédaction d’une section, pour ces Directives, expliquant comment les douanes, les autorités portuaires et les transporteurs peuvent collaborer en vue de lutter contre le trafic de marchandises illicites.

En ce sens, il s’inspire du modèle constructif établi dans le cadre de l’opération TIN CAN et du travail mené avec d’autres organisations et gouvernements. Le WSC est particulièrement impliqué dans les activités entreprises par l’Union européenne (UE) et les pays du Groupe des cinq (l’Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et les États-Unis). Il participe actuellement à l’alliance des ports européens pour lutter contre la criminalité organisée et le trafic de drogue, qui est une initiative lancée sous la présidence belge de l’UE et qui met l’accent sur la collaboration entre les diverses parties prenantes afin d’endiguer les menaces posées par le trafic de stupéfiants.

Pour le WSC et ses membres, la lutte contre les activités illégales dans la chaîne logistique maritime n’est pas un combat récent. Depuis 2001, le WSC travaille en étroite collaboration avec les gouvernements du monde entier en vue d’élaborer les cadres juridiques nécessaires à cet égard et pour appuyer ses membres afin qu’ils puissent déployer des mécanismes avancés de sécurité du fret, qui sont essentiels pour l’évaluation des risques concernant les marchandises et pour la sécurité effective de la chaîne logistique. De plus, le WSC est un grand défenseur du Cadre de normes SAFE depuis qu’il a été adopté en 2005, et il continue d’y contribuer. Plus récemment, le WSC a participé aux travaux sur les Directives pour la prévention et l’élimination de l’introduction clandestine d’espèces sauvages, en partenariat avec le gouvernement belge, le Bureau international des containers (BIC) et le Fonds mondial pour la nature (WWF), en vue de les soumettre au Comité de la simplification des procédures (FAL) de l’Organisation maritime internationale (OMI) de l’ONU.

Le WSC encourage par ailleurs les compagnies maritimes à participer aux programmes volontaires d’opérateurs de confiance, comme le Partenariat douane-entreprises contre le terrorisme (C-TPAT) des États-Unis et le programme d’opérateur économique agréé de l’UE, pour démontrer leur engagement en faveur de la sécurité et de la sûreté, de la protection de leur personnel contre le crime organisé et de la prévention de la corruption.

Les transporteurs maritimes ne toléreront pas que leurs services soient exploités par les syndicats du crime. La collaboration étroite qui lie à présent les transporteurs et les pays du Groupe des cinq ainsi que la coopération multilatérale approfondie avec l’UE livrent déjà des résultats probants. Le WSC et ses membres se réjouissent de renforcer leurs liens avec les autorités douanières et les services chargés de l’application des lois en vue de lutter contre le trafic de drogue. Les administrations qui souhaitent entamer un dialogue avec les compagnies maritimes sont invitées à contacter directement le WSC (aux coordonnées de contact ci-dessous).

En savoir +
https://www.worldshipping.org
alarsson@worldshipping.org