Panorama

Le MERCOSUR lance son modèle de données douanières basé sur la norme de l’OMD et prend une longueur d’avance en matière d’échange de données

22 février 2024
Par Leonardo Pellegrino, Projet Guichet unique pour le commerce extérieur, Direction de refonte des processus douaniers, Bureau général des douanes d’Argentine

Le Marché commun du Sud, plus connu sous l’acronyme de MERCOSUR, est un processus d’intégration régionale entrepris initialement entre l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay, qui ont été rejoints ensuite par le Venezuela (en suspens pour le moment) et la Bolivie (procédure d’adhésion encore en cours). Le MERCOSUR prend ses propres décisions à travers trois organes : le Conseil du marché commun (CMC), principale instance du MERCOSUR qui s’occupe du processus d’intégration sous l’angle politique ; le Groupe marché commun (GMC) qui supervise le fonctionnement du bloc au quotidien ; et, enfin, la Commission du commerce du Mercosur (CCM) qui se charge de l’administration des instruments de politique commerciale communs.

Le 2 août 2010, les membres du MERCOSUR ont convenu d’éliminer la double imposition sur les importations, d’adopter un Code douanier unique et d’introduire dans la foulée le Documento único aduanero del Mercosur (DUAM) ou document douanier unique du Mercosur.

Pour mettre au point le DUAM, les pays du MERCOSUR ont dû 1) se mettre d’accord sur les données à échanger, 2) convenir d’un langage commun à utiliser, 3) harmoniser la manière dont les données requises devaient être soumises. Un modèle de données douanières a donc été créé pour garantir l’interopérabilité des systèmes au niveau régional. Cette initiative a été menée dans le cadre d’un projet avec l’Union européenne (UE) baptisé PADUEM (2004-2007), dont le but était d’harmoniser la législation et les réglementations. Le modèle de données contenait quelque 250 éléments de données, ouvrant la voie à un flux continu d’informations à travers les différents systèmes TI des États membres du MERCOSUR.

Le contenu et la viabilité du modèle de données ont ensuite été évalués par le Comité technique n° 2 du CCM qui travaille sur les questions douanières. Ce travail interdisciplinaire a impliqué de nombreux comités et sous-comités du CCM. En mars 2012, dans le cadre d’un atelier sur le Modèle de données de l’OMD organisé par le Secrétariat de l’Organisation, la Douane argentine a présenté les résultats de l’évaluation ainsi que les similitudes et les différences entre les données du DUAM et le Modèle de données de l’OMD pour les procédures concernées (importation/exportation). Les experts de l’OMD ont formulé quelques suggestions et proposé notamment que cette comparaison soit soumise à l’Équipe de projets chargée du Modèle de données (EPMD) qui se charge de modifier et de tenir à jour le Modèle de données de l’Organisation.

Le GMC a suivi ce conseil et a adopté une résolution selon laquelle le modèle de données du DUAM devait être aligné sur le Modèle de données de l’OMD. En 2015, un nouveau projet baptisé MODDA a été lancé à cet effet. Un groupe de travail a été établi et une participation a été assurée au sein de l’EPMD pour mettre au point, dans le Modèle de données de l’OMD, un dossier d’information (DI)[1] MODDA qui reflète les exigences des pays du MERCOSUR.

Le groupe de travail a cartographié la liste des exigences régionales en matière de données par rapport au Modèle de données de l’OMD et a élaboré le dossier d’information MODDA en reliant certains éléments de données spécifiques avec le Modèle de données de l’OMD. Les éléments qui n’ont pas pu être mis en correspondance ont été publiés dans le DI MODDA en tant qu’extensions. Le groupe a soumis plusieurs demandes de modification (DMR) relatives à des données requises par le DUAM qui ne sont pas représentées dans le Modèle de données de l’OMD. Plusieurs ont été incorporées au Modèle, réduisant ainsi le nombre d’extensions du DI MODDA.

Prenons un exemple pratique. Les informations relatives à une décision anticipée en matière de classement tarifaire n’étaient pas incluses dans le Modèle de l’OMD. L’EPMD a accepté une DMR à ce sujet et a créé un nouveau jeu de données, sous l’identifiant ID 448, appelé « Binding Tariff Reference » (ou référence tarifaire contraignante) avec la description suivante : « Numéro de référence désignant un classement tarifaire national ou régional standard des marchandises dans la nomenclature tarifaire/statistique basé sur le Système harmonisé. »

Le groupe de travail a rencontré plusieurs défis durant le développement du DI MODDA. Tout d’abord, la barrière linguistique : le Modèle de données de l’OMD est publié en anglais et les délégués de l’EPMD parlent l’anglais ou le français alors que ceux du MERCOSUR travaillent en portugais et en espagnol. Les représentants chargés de la coordination dans chacun des pays du bloc devaient donc être capables de travailler dans l’une des langues de travail de l’OMD et la résolution n° 9/21 du GMC approuvant le MODDA a été rédigée en espagnol, en portugais et en anglais.

De plus, sur le plan technique, évaluer la nécessité d’ajouter un nouvel élément de donnée dans le Modèle est difficile, et trouver la manière de l’exprimer également.  Les experts ont dû vérifier si les exigences en matière de données n’étaient pas déjà représentées par des normes internationales existantes et, le cas échéant, si la façon dont elles étaient représentées répondait aux exigences des systèmes nationaux ou régionaux. À plusieurs reprises, le groupe a bénéficié de l’assistance technique des experts de l’OMD et des spécialistes du secteur privé.

Les travaux menés par le groupe se sont achevés en 2019. En 2021, l’utilisation du Modèle de données MODDA est devenue obligatoire pour toutes les administrations des douanes du MERCOSUR aux fins de l’échange des données des déclarations en douane à l’importation et à l’exportation dans le MERCOSUR, ainsi que dans chaque projet impliquant un échange de ce type d’informations, notamment avec des pays ou groupes de pays tiers.

L’utilisation d’un modèle de données basé sur la norme de l’OMD ouvre de nouveaux horizons en matière d’échange de données. Les pays du MERCOSUR s’attachent à présent à adapter leur modèle actuel d’échange d’informations pour permettre à n’importe quelle administration des douanes utilisant le Modèle de données de l’OMD d’accéder aux données stockées dans le système INDIRA ou de fournir des données aux Membres du MERCOSUR, pour autant que le cadre légal permette ce genre d’échange de renseignements.

En savoir +
dga-internacionales@afip.gob.ar

[1] Afin de simplifier l’architecture d’un tel environnement, les éléments du Modèle de données sont organisés en petits éléments constitutifs appelés dossiers d’information (DI). Chaque dossier d’information est un sous-ensemble du Modèle de données se référant à un contexte spécifique.