Les tremblements de terre dévastateurs qui ont frappé le sud-est de la Türkiye le 6 février 2023 ont détruit 13 villes et touché directement environ 16 millions de personnes. Les autorités ont immédiatement déclaré un état d’alerte de niveau quatre qui a déclenché un appel à l’aide internationale. Au cours des trois mois qui ont suivi les séismes, la Türkiye a reçu environ 7 800 envois d’aide humanitaire en provenance de 120 pays, ainsi que des équipes de secours, des chiens et du matériel. La Douane turque présente dans cet article comment elle a facilité la circulation des marchandises et des personnes, et les difficultés rencontrées.

L’Autorité de gestion des catastrophes et des urgences (AFAD) est l’institution turque chargée de prévenir les catastrophes et de réduire autant que possible les dégâts que celles-ci occasionnent, de planifier et de coordonner les interventions après les catastrophes et de favoriser la coopération entre les différents organismes publics. Relevant du ministère de l’Intérieur, elle a élaboré un plan national d’intervention en cas de catastrophe, en collaboration avec les institutions nationales concernées, parmi lesquelles le ministère du Commerce et son service des douanes. La Douane turque a donc participé à des réunions sur la mise en œuvre du plan afin de définir les mesures à prendre dans différents scénarios pré-catastrophe/post-catastrophe. De nombreuses questions pratiques ont été abordées, par exemple comment travailler 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, quelles devraient être les personnes et les institutions avec lesquelles communiquer, ou encore quelles seraient les modalités de transport les plus rapides et les plus faciles à mettre en œuvre. La Douane a également participé à des activités organisées aux niveaux international et régional sur la gestion des catastrophes, dont des exercices de simulation en salle au cours desquels des équipes débattent de leurs rôles et de leurs interventions en cas d’urgence, sur la base de scénarios types.

Le plan national d’intervention en cas de catastrophe porte création d’un groupe de soutien et de coopération internationale en cas de catastrophe, essentiellement chargé de coordonner la distribution de l’aide aux victimes. Au sein de ce groupe, la Douane turque a comme rôle d’assurer le dédouanement rapide de l’aide internationale et de la diriger vers la région qui en a besoin, en coordination avec d’autres institutions. Elle doit également veiller à la communication avec les acteurs de l’aide dans le pays et à l’étranger afin qu’ils comprennent tous ce qui est considéré comme marchandises de secours et les procédures douanières qui s’y rapportent.

La réglementation turque en matière d’importation exige, dans les situations de crise, un connaissement ou une liste de colisage pour les articles de secours (couvertures et tentes, par exemple) contenant des renseignements spécifiques sur les marchandises (type, description, quantité, poids, plaque d’immatriculation du véhicule et nom du navire/numéro de vol). Les importateurs peuvent également faire une déclaration orale.

Immédiatement après les tremblements de terre, la liste des marchandises considérées comme des marchandises de secours, ainsi que leurs conditions d’importation, ont été communiquées via de nombreux canaux de communication, tant en anglais qu’en turc. La liste des institutions publiques, des organisations et des associations œuvrant pour l’intérêt général qui pouvaient recevoir des marchandises de secours et bénéficiaient d’exonérations fiscales a également été publiée. Toutes ces informations ont également été fournies par les représentations turques à l’étranger dans les langues locales.

Par conséquent, bien que la Türkiye n’ait pas ratifié l’annexe spécifique J de la Convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers (amendée) qui, dans son chapitre 5 sur les envois de secours, invite les États à autoriser « le dépôt d’une déclaration de marchandises simplifiée, provisoire ou incomplète, sous réserve que la déclaration soit complétée dans un délai déterminé », la réglementation douanière turque facilite le processus de déclaration pour les envois de secours.

L’ensemble du personnel, en particulier le personnel douanier dans les zones touchées par les séismes, a travaillé d’arrache-pied pour accomplir les procédures et dédouaner l’aide humanitaire aussi vite que possible, sans interruption du transport. Les fonctionnaires chargés du dédouanement ont travaillé 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour mener à bien et faciliter le dédouanement des envois humanitaires. D’autres agents, par exemple les experts du département des exemptions, ont travaillé selon des horaires flexibles pour apporter leur aide chaque fois que cela était nécessaire.

Les contrôles de conformité à la politique commerciale, s’agissant par exemple de l’origine des marchandises, n’ont pas été effectués sur les envois de secours. En outre, les organismes de réglementation aux frontières ont accepté de simplifier l’inspection des marchandises relevant de leur compétence en suspendant les activités d’échantillonnage et d’analyse. L’examen des marchandises a été effectué par le personnel de l’institution concernée au bureau des douanes, et les marchandises ont été envoyées immédiatement dans les zones touchées par les séismes.

Les informations relatives à l’importation de marchandises essentielles, telles que les maisons préfabriquées, les conteneurs, les tentes et les denrées alimentaires, ont été recueillies à l’avance par le ministère des Affaires étrangères grâce aux canaux de communication établis avec les organisations nationales et internationales. Elles ont ensuite été transmises au bureau de douane compétent. En l’absence de bureau de douane sur le lieu d’arrivée des marchandises de secours, des équipes douanières mobiles étaient envoyées pour accomplir les procédures.

L’annexe B9 de la Convention relative à l’admission temporaire (Convention d’Istanbul) dispose que l’admission temporaire est accordée sans qu’il soit exigé de document douanier et sans constitution de garantie, mais que les autorités douanières peuvent exiger le dépôt d’un inventaire des marchandises ainsi qu’un engagement écrit de réexportation. La Türkiye a accepté l’annexe et ses dispositions ont été appliquées à l’admission temporaire de certaines marchandises comme les tentes, les maisons préfabriquées, les couvertures et les véhicules, ainsi que le matériel médical et de laboratoire, à condition que le destinataire des marchandises figure sur la liste publiée par le gouvernement.

Une attention particulière a été accordée à l’importation des marchandises telles que le matériel médical et chirurgical, soumis à des réglementations spécifiques et au contrôle d’une autre autorité nationale. Ces marchandises ont été livrées exclusivement à des hôpitaux ou des établissements de santé. De même, les médicaments, les consommables médicaux et les produits médicaux apportés par les médecins et le personnel de santé ont été autorisés sous réserve de présentation de la liste des marchandises à l’administration douanière et de l’accomplissement des procédures douanières simplifiées.

Bien que les informations sur les règles d’importation des marchandises de secours aient été diffusées immédiatement après les tremblements de terre, de nombreuses personnes vivant à l’étranger ont envoyé des colis à leurs amis et à leur famille, ce qui a entraîné un surcroît de travail pour le personnel de la Douane. Les agents ont adapté leur temps de travail pour assurer un service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 les premiers jours, mais ils ont eu de plus en plus de mal à tenir ce rythme au fil du temps. Les agents faisant une longue journée ont ainsi été invités à se reposer le lendemain.

Le dédouanement des expéditions de médicaments était un autre défi à relever. Dès le début, des discussions ont eu lieu avec le ministère de la Santé, chargé de l’inspection de conformité des produits pharmaceutiques, sur l’approche à suivre face au fait que le processus d’inspection était généralement long et que l’étiquetage et la documentation technique des produits ne seraient pas conformes aux exigences nationales en matière de traduction. Comme il n’y avait pas de problème de stock dans le pays pour les produits concernés, il a été décidé d’exclure les médicaments de la liste des marchandises de secours jusqu’à avis contraire du ministère de la Santé. Les médicaments et consommables médicaux ont été autorisés uniquement s’ils étaient apportés par les médecins d’une équipe de secours ou envoyés à un établissement de santé ou à un hôpital. Cette décision a entraîné des retards dans le dédouanement de certaines expéditions mixtes qui contenaient des médicaments.

En outre, les contrôles ont parfois été complexes. La Douane turque s’est efforcée de faciliter les procédures douanières compte tenu de la situation d’urgence à laquelle elle faisait face, mais elle devait également appliquer des mesures de politique commerciale à certaines marchandises. Certaines marchandises considérées comme présentant un risque élevé et nécessitant des contrôles supplémentaires, ainsi que des articles qui n’étaient pas reconnus comme des marchandises de secours, ont parfois été inclus dans des envois déclarés comme étant des marchandises de secours. La Douane a donc dû faire preuve de vigilance, repérer et séparer les marchandises dans un même envoi.

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