Les gouvernements ne cessent d’introduire de nouveaux cadres réglementaires dans le but de s’assurer que le commerce de marchandises reste conforme à leurs objectifs. Si le législateur fait peser la charge de la conformité sur les importateurs eux-mêmes, la Douane doit également assumer l’énorme responsabilité de veiller à l’application effective de ces règles sans pour autant entraver les rouages de l’économie mondiale. La meilleure marche à suivre consiste donc à utiliser intelligemment les données et la technologie afin d’équiper les autorités douanières des connaissances et des outils dont elles ont besoin.

Au cours des dernières années, un ensemble de nouveaux défis sont apparus sur le plan commercial et les législateurs en Europe, aux États-Unis et plus largement dans le reste du monde ont mis en place une série de nouvelles mesures. Certaines cherchent à éradiquer les pratiques d’exploitation au travail, tandis que d’autres ont été introduites pour répondre aux conflits géopolitiques – les sanctions imposées par l’OMC face à la situation actuelle en Ukraine en sont un exemple notable. Toutes ces mesures ont des effets sur des milliers de personnes et d’entreprises partout dans le monde.

Aujourd’hui, les pays commencent même à adopter leurs propres mesures unilatérales ; des lois sur la diligence raisonnable (ou le devoir de vigilance) dans la chaîne logistique ont été récemment adoptées en France, en Suisse, aux Pays-Bas, en Norvège, en Allemagne et même en Californie, et, ensemble avec les mesures obligatoires de l’ONU sur la diligence raisonnable en matière de droits de l’homme entrées en vigueur fin janvier 2023, elles rendront les entreprises légalement responsables pour leurs chaînes logistiques. Ces initiatives sont justifiées et leur intention est bonne mais, pour qu’elles répondent vraiment aux attentes et soient réellement respectées tant par les acteurs publics que privés, il sera indispensable d’arriver à une visibilité en temps réel des chaînes logistiques et de pouvoir établir le lien entre les marchandises et les pratiques illicites auxquelles elles sont éventuellement associées.

Les rôles et responsabilités des importateurs pour assurer leur propre conformité par rapport à la législation sont clairs, même s’ils sont très difficiles à assumer. La Douane, en tant que gardienne des mouvements de marchandises à l’entrée et à la sortie du pays, devra toutefois aussi jouer un rôle central à ce niveau, dans la mesure où son mandat et sa responsabilité primordiale consistent à s’assurer que les flux commerciaux demeurent dans leur ensemble conformes, sûrs et, au final, aussi éthiques. Mais comment ? En améliorant coopération et échange de connaissances, et en tissant des liens de collaboration entre les secteurs public et privé.

Rien qu’en 2022, plus de 10 000 cadres réglementaires affectant le commerce international ont été introduits et, aujourd’hui, il n’est plus possible de gérer les flux commerciaux sans passer au niveau supérieur sur le plan de la numérisation et de l’automatisation. La technologie et l’innovation nous offrent à présent de vrais nouveaux horizons qui nous permettent d’accéder à des informations utiles et exploitables.

Toutefois, les progrès technologiques ne peuvent provenir uniquement de l’intérieur ; en d’autres termes, la numérisation ne peut dépendre uniquement des jeux de données des régulateurs. Il est indispensable d’adopter une nouvelle approche pour l’inspection numérique des marchandises et le contrôle de leur origine, en s’appuyant sur la richesse et la diversité des données mondiales, dont la portée dépasse de loin celles d’une simple déclaration à l’importation ou d’un manifeste de marchandises.

Pour renforcer leurs capacités dans le domaine de la conformité règlementaire, les douanes pourraient envisager d’utiliser et d’intégrer des technologies qui assurent une bien plus grande visibilité de la chaîne logistique, en recourant à des techniques dernier cri de collecte et d’analyse en temps réel des données à grande échelle et qui présentent de manière simple et digeste les constatations tirées.

Les outils analytiques qui tirent parti des données multidimensionnelles sont en train de devenir rapidement un élément à part entière irremplaçable de l’écosystème de données douanières. Cependant, dans le monde d’aujourd’hui, les modèles qui restent basés uniquement sur des données locales, historiques et nationales sont limités et leur utilisation est par conséquent tout aussi limitative. Ces modèles laissent passer des informations cruciales en cours de route, ce qui les empêche de tirer des renseignements exploitables. Les sources mondiales, qui tiennent compte des conditions du marché ainsi que des lois et des règles du commerce en temps réel, peuvent potentiellement fournir des informations et donner lieu à une automatisation d’un tout autre niveau.

Afin de préserver l’équilibre délicat entre la performance maximale des procédures douanières et la garantie de leur qualité, les autorités douanières devront définir les bons outils qui mettent à contribution les données, et les intégrer dans leur système, en travaillant ensemble avec le secteur privé à cet effet.  Cet effort commun entre le secteur public et le secteur privé sera la prochaine étape sur la voie vers la mise en place d’une approche numérique des procédures douanières axée sur les données.

Alors que nous passons de l’année 2022, que l’OMD a consacrée à la transformation numérique et au développement d’écosystèmes de données, à 2023, où l’accent sera mis sur le partage des connaissances, il est important que nous comprenions pleinement comment la technologie qui permet la collecte et l’analyse exhaustive des données peut nous aider à produire des connaissances sur les chaînes logistiques et sur les problèmes de conformité.

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