Panorama

Des outils d’analyse performants pour aider la Douane arménienne à mieux lutter contre la contrefaçon

3 mars 2023
Par Ruzanna Kusikyan, chef de la division de l’analyse et de la gestion des risques, département informatique, Commission des recettes publiques de la République d’Arménie

Cet article présente dans les grandes lignes l’évolution de la gestion des risques au sein de la Douane arménienne et traite en particulier des outils d’analyse mis au point pour mieux lutter contre la contrefaçon.

La mise en place d’un outil de gestion des risques pour gérer la circulation des marchandises en Arménie remonte à 1999, avec le déploiement du système douanier automatisé de la CNUCED (SYDONIA) qui comprenait un module de sélectivité. SYDONIA et ce module de sélectivité ont été remplacés en 2008 par un système d’information interne, qui a lui-même laissé place en 2015 au guichet unique national pour le commerce extérieur (https://trade.gov.am). En 2017, le module de sélectivité qui avait été mis au point dans le cadre du système d’information interne de 2008 a été remplacé par un système de gestion des risques toujours utilisé aujourd’hui.

Les concepteurs de ce nouveau système ont tenu compte des normes et recommandations internationales établies par l’OMD, la Banque mondiale, l’Organisation des Nations Unies et l’Organisation mondiale du commerce. Ils ont également acquis des connaissances en travaillant avec des experts de pays de l’Union européenne (UE) dans le cadre d’un « projet de jumelage », instrument que l’UE utilise pour la coopération entre les administrations publiques de ses États membres et des pays bénéficiaires.

Flexibilité et améliorations continues

L’outil mis au point est flexible et est développé et élargi en permanence. Comme d’autres systèmes automatisés, il collecte, organise et catégorise des données qui proviennent de différents systèmes informatiques à partir de règles définies au moye de méthodes d’apprentissage automatique. Il offre non seulement des fonctions de ciblage mais aussi des mécanismes de retour d’information ainsi que des outils de suivi et d’analyse des activités. Des classifieurs spécifiques ont été développés pour s’assurer de l’utilisation efficace des données relatives aux résultats des contrôles, le but étant d’améliorer sans cesse la politique de gestion des risques. Un classifieur est un algorithme qui classe les données entrantes dans certaines catégories. L’un est axé sur les mesures d’atténuation des risques, tandis qu’un autre s’intéresse aux résultats de ces mesures. Un autre classifieur permet d’analyser les éléments qui justifient de modifier les procédures de contrôle.

Pour l’heure, le guichet unique national pour le commerce extérieur relie 30 systèmes ou composants, parmi lesquels le système automatisé de la douane « eCustoms ». Les composants les plus récents traitent respectivement les déclarations des moyens de transport, et les déclarations de marchandises et de passagers pour le fret express. Un système intégré de contrôle des frontières a été mis en place en 2022 et assure l’interopérabilité entre les systèmes douaniers et le système informatique qu’utilisent les gardes-frontières travaillant sous l’égide du service de sécurité nationale. D’autres systèmes, tels que la base de données unifiée des infractions douanières et le système d’analyse et de ciblage des contrôles après dédouanement, sont en développement. Lors de la conception et de la mise en œuvre de ces systèmes, l’accent est mis sur l’intégration et l’interopérabilité avec le système de gestion des risques, dont les fonctionnalités sont étendues pour couvrir les risques spécifiquement liés aux processus gérés par les systèmes nouvellement ajoutés.

Les quatre tâches dans l’analyse des données

Droits de propriété intellectuelle

En 2018 a été mis au point un module pour repérer les atteintes aux droits de propriété intellectuelle (DPI). Des profils de risque ont été établis pour chaque produit enregistré auprès de la Douane par un titulaire de DPI. Ce module est régulièrement évalué et les méthodes d’analyse améliorées pour répondre à certains défis. Par exemple, certains commerçants essaient d’échapper aux contrôles en écrivant mal les noms de marque. Il s’agit aussi de limiter les faux positifs dus à la similitude des mots, de répondre au nombre croissant d’entités qui ont le droit d’importer ou d’exporter des produits de marque, ou encore de prendre en compte l’existence de produits différents enregistrés par des titulaires de droits différents, mais qui portent le même nom. Face à ces difficultés, les profils de risque sont diversifiés et de nouvelles règles de sélectivité sont définies. Un des algorithmes utilise les données historiques pour repérer d’éventuelles correspondances pour chaque produit enregistré. Un autre recense toutes les façons d’écrire frauduleusement les noms des produits ou des marques. Ainsi, si une cargaison contient un produit correspondant à un profil de risque, un avertissement est envoyé à un agent de contrôle ainsi qu’aux agents de la Commission des recettes publiques chargés de la protection de la propriété intellectuelle. Si le produit est toujours jugé suspect à l’issue de l’inspection, la mainlevée du fret est suspendue et la procédure légale est déclenchée. On a enregistré en 2018 un nombre de suspensions de ce type 21 fois plus élevé qu’en 2017. Ce nombre ne cesse d’augmenter depuis ; en 2021, il était 68 % plus élevé qu’en 2020. L’efficacité accrue de la protection des DPI s’est traduite par l’augmentation du nombre de demandes d’intervention enregistrées par la Douane arménienne qui ont presque doublé depuis 2018.

Lors de la conférence géorgienne sur la cybersécurité et l’innovation informatique qui s’est tenue en 2019, le module DPI mis au point par la Commission des recettes publiques arménienne a remporté le prix de la meilleure ressource informatique en ligne. La Commission a également reçu le prix de la meilleure entité de gestion informatique pour avoir mené à bien plusieurs projets informatiques dans le domaine des douanes.

Vision d’avenir : ressources humaines, technologies et coopération

La Commission des recettes publiques a adopté une stratégie en matière de numérique qui influe sur la façon dont l’Administration gère les risques et comprend les risques connus et inconnus. Cette stratégie va de pair avec la mise au point de nouveaux outils d’analyse. Si l’Administration a déjà prouvé sa capacité d’analyser les mégadonnées, son prochain objectif est d’utiliser l’intelligence artificielle pour traiter très rapidement de grandes quantités de données au moyen d’algorithmes qui évoluent au fil du temps pour faire de mieux en mieux ce pour quoi ils sont conçus. Atteindre un objectif aussi ambitieux suppose de mobiliser des connaissances et des compétences. L’Administration a défini trois grands axes dans ce contexte : les ressources humaines, les technologies et la coopération.

Ressources humaines

Aucune innovation, aucune avancée et aucun développement n’est possible sans des professionnels créatifs et visionnaires qui soient prêts à élargir leurs horizons, à apprendre et à essayer de nouveaux concepts. Si trouver et engager les bonnes personnes est crucial, il est encore plus important d’investir sans cesse dans leur développement et de leur offrir des possibilités de progresser, d’apprendre, de s’épanouir professionnellement et de contribuer à la concrétisation de la vision de l’Administration. La Commission des recettes publiques a pris cet engagement et développe des possibilités de formation et des mécanismes d’échange d’expériences avec d’autres administrations douanières. Elle encourage en outre son personnel à suivre des formations en ligne, notamment celles qui sont proposées sur la plateforme d’apprentissage CLiKC! de l’OMD.

Technologies

La technologie évolue à un rythme effréné et il faut donc déployer des efforts importants non seulement pour suivre ce rythme, mais aussi pour adapter les nouvelles technologies aux besoins particuliers de l’Administration douanière. À cette fin, les agents doivent absolument explorer constamment et se tenir au courant des dernières innovations. Ils doivent consacrer du temps à la lecture et à la recherche dans leur travail quotidien.

Coopération

Il est pratiquement impossible de travailler efficacement seul de son côté, surtout lorsque les ressources sont limitées. L’Administration doit donc absolument développer des mécanismes de coopération efficaces avec d’autres administrations douanières et avec des organisations internationales. Cette coopération doit inclure des échanges d’expériences et de bonnes pratiques ainsi que la réalisation de projets communs, tels que la mise au point d’outils d’analyse. La Commission des recettes publiques arménienne est prête à collaborer avec des administrations douanières, que ce soit pour échanger des connaissances ou pour mettre en œuvre des projets pilotes communs. Les personnes souhaitant en savoir plus sur le système de gestion des risques de la Douane arménienne, par exemple, sont invitées à envoyer un courrier électronique à l’adresse indiquée à la fin de cet article. Le système a été présenté lors d’un certain nombre d’événements et a suscité un vif intérêt et des réactions positives de la part des experts et des praticiens des douanes. Pour la Commission des recettes publiques, la clé de l’innovation est la coopération et, même si cette coopération demande une planification et des ressources, les douanes ont beaucoup à gagner à travailler ensemble.

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ruzanna_kusikyan@customs.am