Couche d’ozone et protection du climat : le rôle essentiel de la douane
26 février 2020
Par Ezra Clark, Programme des Nations unies pour l’environnementLa couche d’ozone, présente dans l’atmosphère bien au-dessus de nos têtes, est d’une importance vitale pour protéger les êtres vivants des rayonnements ultraviolets. Sans elle, la vie sur Terre ne serait tout simplement pas possible. Cette fine couche de gaz s’épuise, pourtant, comme conséquence des émissions de substances qui l’appauvrissent et qui sont fabriquées par l’homme, telles que les chlorofluorocarbures (CFC) et les hydrochlorofluorocarbures (HCFC), deux gaz utilisés avant tout pour la réfrigération et la climatisation ainsi que pour la fabrication de mousses.
En octobre 2019, plusieurs médias signalaient que le trou dans la couche d’ozone, qui se forme tous les ans au-dessus de l’Antarctique, était le plus petit jamais enregistré. La nouvelle est certes très encourageante mais elle n’indique pas que la couche d’ozone se soit pour autant reconstituée. La petite taille du trou dans la couche d’ozone est due aux températures anormalement plus élevées dans la haute atmosphère, qui empêchent ce trou d’atteindre ses dimensions habituelles. Malgré tout, la couche d’ozone se répare lentement mais sûrement, sa reconstitution pleine étant attendue pour la deuxième moitié du siècle.
Le Protocole de Montréal
Cette « réussite » environnementale témoigne des efforts réalisés pour mettre en place les dispositions du Protocole de Montréal relatif aux substances qui appauvrissent la couche d’ozone, accord négocié au niveau international et qui engage ses parties contractantes, les nations du monde entier, à éliminer progressivement l’utilisation de 99% des substances incriminées.
On pourrait en conclure qu’une catastrophe environnementale mondiale a pu être évitée et qu’il suffit maintenant d’attendre, tout simplement. La réalité, toutefois, est plus inquiétante. Même s’ils n’appauvrissent pas la couche d’ozone, de nombreux produits autres que les CFC et les HCFC menacent sérieusement de réchauffer la planète. Certains ont un effet de réchauffement de l’atmosphère près de 15 000 fois plus puissant que le dioxyde de carbone.
Fort heureusement, en janvier 2019, l’Amendement de Kigali au Protocole de Montréal est entré en vigueur. Cet amendement historique élargit le champ d’application du Protocole aux hydrofluorocarbures (HFC), principaux produits alternatifs aux CFC et aux HCFC, engageant les pays à éliminer progressivement leur production et leur consommation conformément à des calendriers préalablement établis. Grâce à cet amendement, le Protocole de Montréal participe à la lutte contre le changement climatique. Il est estimé que sa mise en place permettra d’éviter une augmentation des températures mondiales de l’ordre de 0,4°C d’ici la fin du siècle.
En s’assurant que le commerce de ces produits chimiques respecte les dispositions du Protocole de Montréal, les douaniers contribuent directement à la protection de l’environnement et au bien-être de l’humanité. Ils sont tenus de faciliter le commerce légal des produits couverts par le Protocole et d’empêcher tout échange illicite. À ce propos, la contrebande de CFC et d’autres substances appauvrissant la couche d’ozone représente un énorme problème depuis l’entrée en vigueur du Protocole de Montréal et, à l’heure actuelle, de plus en plus d’éléments de preuve indiquent que les CFC continuent d’être fabriqués dans l’illégalité, alors qu’ils auraient dû être complètement éliminés il y a une décennie.
Outre ce rôle répressif, la douane assure l’enregistrement et le suivi des échanges de ces produits et est chargée de rapporter des données détaillées sur leur importation et exportation, ces informations démontrant le niveau de respect d’un pays par rapport à ses engagements au titre du Protocole. La douane intervient donc à plus d’un titre au premier chef dans l’application des réglementations traduisant au niveau national les dispositions du Protocole.
Prochain chapitre
Avec l’Amendement de Kigali, que certains appellent le « prochain chapitre » du Protocole de Montréal, les douaniers sont à nouveau appelés à jouer un rôle important. Pour assurer le suivi et le contrôle du commerce des HFC, ils ont besoin d’une nomenclature nationale qui identifie clairement, sur la base du Système Harmonisé (SH) de l’OMD, les HFC les plus courants et les mélanges réfrigérants utilisés.
La Nomenclature actuelle du SH, fondée sur l’édition 2017, n’inclut pas de codes spécifiques pour les HFC. L’OMD a donc recommandé que des codes spécifiques soient créés pour ces produits dans les nomenclatures nationales, en attendant l’entrée en vigueur de l’édition 2022 du SH qui inclura, elle, bel et bien des positions spécifiques pour les HFC et leurs mélanges les plus couramment échangés.
À cet égard, sans ces codes nationaux du SH, les pays rencontreront d’énormes difficultés à appliquer le régime de licences pour l’importation et l’exportation des HFC que chaque pays signataire de l’Amendement de Kigali devrait avoir mis en place depuis le 1er janvier 2019 (ou deux ans plus tard, le cas échéant). De même, il sera très difficile de calculer la consommation de ces substances, puisque, dans le cadre du Protocole de Montréal, la consommation est calculée sur la base des données concernant les importations et les exportations ainsi que sur toute activité de fabrication et de destruction des HFC.
Coopération en cours
Il est de la plus haute importance que les administrations des douanes qui n’ont pas encore créé de codes du SH pour les HFC dans leur nomenclature nationale se penchent sur la question sans plus tarder et suivent la recommandation de l’OMD. OzonAction, filiale du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), et l’OMD ont publié un dossier d’information sur le sujet qui fournit des orientations détaillées sur la manière de gérer cette question.
De fait, depuis plusieurs années, les deux organisations travaillent en étroite coopération afin de mettre au point et de diffuser du matériel d’information ainsi que des outils de formation innovants, de mettre en place des opérations de lutte contre la fraude et de concevoir des exercices de partage du renseignement visant à faciliter le commerce légal des substances appauvrissant la couche d’ozone tout en endiguant les échanges illicites.
L’un des derniers ateliers organisés par OzonAction, qui s’est tenu en Ouganda, a permis aux spécialistes nationaux de l’ozone et aux douaniers des pays d’Afrique de l’Est de débattre des défis globaux rencontrés dans la région ainsi que des meilleures pratiques en matière de contrôle du commerce des substances appauvrissant la couche d’ozone. La réunion a également permis à ces experts d’examiner, en toute confidentialité, les statistiques à l’importation et à l’exportation de leurs pays respectifs, de les comparer avec celles de leurs partenaires commerciaux et d’étudier les différences, de quelque nature que ce soit, dans les données rapportées.
Les participants ont pu aussi manipuler lors d’exercices pratiques des équipements permettant d’analyser les réfrigérants. Ces identificateurs sont essentiels pour identifier le ou les produits en présence étant donné la diversité des réfrigérants disponibles et échangés. Le PNUE fournit de tels équipements à plus de 100 pays et fournit une formation et du matériel d’information, y compris des vidéos, sur leur utilisation ainsi que sur les options de traitement des cargaisons de frigorigènes saisies.
Une démonstration des applications pour smartphone développées par OzonAction a également eu lieu lors de l’atelier mentionné plus haut. Les applications incluent « WhatGas? », une base de données qui permet de trouver rapidement des informations sur les substances qui appauvrissent la couche d’ozone, y compris leurs noms commerciaux et les mesures de contrôle qui s’appliquent à ces marchandises.
Les administrations des douanes intéressées par de tels ateliers ou qui ont besoin d’une assistance peuvent prendre contact soit avec le Secrétariat de l’OMD, soit avec OzonAction : les deux organisations sont prêtes à apporter leur plein soutien aux douaniers partout dans le monde afin qu’ils puissent garantir que le Protocole de Montréal continue de porter ses fruits… tant pour la protection de la couche d’ozone que pour la prévention de tout réchauffement ultérieur de la planète.
En savoir +
www.unenvironment.org/ozonaction