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Quelques idées glanées lors de la Conférence sur les stratégies de communication

27 février 2020
Par Laure Tempier, Service communication de l’OMD

Si les conférences organisées par le Secrétariat de l’OMD portent généralement sur des questions techniques liées aux douanes et aux échanges commerciaux, comme les technologies de l’information, les opérateurs économiques agréés (OEA), le Système harmonisé ou la sécurité, un événement a fait figure d’exception l’an dernier : la Conférence sur les stratégies de communication.

Les pratiques, outils et stratégies de communication avaient certes déjà fait l’objet de discussions au sein de divers organes de travail de l’OMD, mais il y avait longtemps que des spécialistes de la communication du secteur public et du secteur privé, ainsi que des représentants de diverses entités interagissant avec les douanes, n’avaient plus été invités à assister à une manifestation de l’OMD entièrement consacrée à cette question. L’objectif de la conférence était de donner à ces professionnels l’occasion de se rencontrer et d’échanger des idées, voire de nouer des relations solides et durables.

Nous vivons dans une ère de communication, et il est temps que nous commencions à nous y intéresser sérieusement. Comme l’a relevé l’un des intervenants, « la communication ne devrait pas être considérée comme une chose sur laquelle on se penchera quand on aura un peu d’argent, quand on aura le temps, plus tard. Elle devrait faire partie des activités essentielles des organisations. » Vous trouverez ci-dessous quelques observations glanées lors de cet événement de deux jours, qui s’est déroulé en octobre 2019.

Le personnel doit être informé et sa voix entendue

La communication interne peut se définir comme la façon dont une organisation interagit avec son personnel et dont il interagit avec elle. Elle a pour but de créer une compréhension commune des valeurs et des objectifs de l’organisation parmi ses collaborateurs. Il s’agit notamment d’annoncer les changements et les nouveaux projets en temps opportun, d’expliquer les décisions de manière transparente, avec leurs avantages et leurs inconvénients, et d’analyser ouvertement les chances de succès ou d’échec des projets afin d’anticiper les frustrations potentielles.

Plusieurs canaux de communication avec les employés ont été mentionnés : la tenue de réunions mensuelles entre l’équipe de direction et le personnel pour expliquer ce qui se passe au sein d’une administration et obtenir les retours de tous ; l’organisation de petits déjeuners et d’autres mini-événements afin de rassembler le personnel pour des séances d’information ; la production de bulletins où la direction et les employés racontent leurs histoires ; l’installation d’écrans aux quatre coins des locaux pour diffuser des vidéos ou des messages ; et la mise en place de centres d’appels internes pour les employés. Un intervenant a également expliqué que, dans son organisation, chaque nouvel arrivant reçoit un « pack de bienvenue » qui contient une carte avec le nom d’un employé, l’invitant à prendre contact avec lui pour déjeuner ou prendre un café.

Nous ne devrions pas nous concentrer sur un seul canal ; nous devrions plutôt les mélanger pour être sûrs de toucher tous les employés, y compris les télétravailleurs et le personnel de première ligne sans poste de travail fixe. Un retour devrait être recueilli dans toute l’organisation sur la façon dont les employés « consomment » les communications de l’entreprise afin de mieux comprendre ce qui fonctionne actuellement (ou non, le cas échéant) en fonction des différents profils de collaborateurs – télétravailleurs, travailleurs de première ligne, cadres, nouveaux employés et même collaborateurs de longue date.

En outre, la communication interne doit être un processus bidirectionnel. Cela étant, les employés n’ont pas seulement besoin d’être écoutés, ils doivent aussi savoir que leurs commentaires ont été pris en compte et suivis d’effet, ou, si ce n’est pas le cas, pourquoi ; c’est l’essence-même de la communication bidirectionnelle, qui renforce à la fois le moral et l’intérêt du personnel au sein d’une organisation.

Communication externe et communication interne sont liées

Si la communication externe et la communication interne étaient auparavant des disciplines bien distinctes, la limite entre les deux s’estompe désormais. Les médias sociaux permettent à tout un chacun de partager son point de vue sur une organisation. Créer un sentiment d’appartenance interne et une compréhension commune des messages clés entre tous est donc essentiel au maintien ou au développement d’une bonne image vis-à-vis de l’extérieur. Et inversement : la communication externe permet à une organisation d’accroître sa réputation et d’inspirer de la fierté à ses collaborateurs. « Le personnel n’a pas besoin d’une cantine ou d’un magazine pour mieux travailler, il a besoin que son organisation ait une bonne image », a souligné un participant.

Différents canaux de communication externe, comme la télévision ou la radio, sont disponibles en fonction du public cible et du budget. Certaines administrations se sont montrées très créatives, faisant appel à des comédiens pour jouer de courts scénarios ou même à des musiciens pour communiquer avec le public lors d’une campagne itinérante. Si les canaux de communication traditionnels gardent toute leur actualité, d’autres outils ont ainsi désormais aussi leur place dans les stratégies de communication.

Cependant, une question cruciale subsiste : sur quoi communiquer ? De nombreuses administrations se bornent généralement, dans leur communication proactive avec le monde extérieur, aux questions ayant trait à la détection de marchandises prohibées, informant surtout le public des saisies importantes. Si le contenu de ces communications dépend de la situation du pays, de la culture de l’administration publique et de l’importance des douanes au sein de l’appareil étatique, il se limite le plus souvent aux résultats obtenus dans le cadre des actions répressives, qui passent plutôt bien auprès du public et des médias.

Plusieurs intervenants ont avancé que les douanes devraient également expliquer ce qu’elles font et comment, mettre en évidence les compétences de leurs agents et le bon travail de ceux-ci, l’impact de leurs actions sur la société et la vie des populations, et ce qu’elles ont accompli ou n’ont pas réussi à accomplir. À cet égard, il est capital de rendre compte honnêtement des activités et des résultats. « L’honnêteté est essentielle, sinon vous n’aurez aucune visibilité », a mis en garde un intervenant.

Il est essentiel de se fonder sur des faits et des chiffres, mais aussi de communiquer de manière convaincante pour attirer l’attention du public, souvent déjà enseveli sous une masse d’informations. L’information doit en outre être rédigée de manière compréhensible et « digeste » pour le grand public, dans un langage simple qui évite tout jargon.

Il est essentiel de raconter des histoires captivantes

« Ce n’est un secret pour personne. Les communications gouvernementales sont ennuyeuses », a déclaré un intervenant. La meilleure façon de communiquer efficacement est de raconter des histoires. La psychologie le confirme : quand quelqu’un vous raconte une histoire et que vous êtes complètement absorbé par celle-ci, vos ondes cérébrales entrent en résonance avec celles du narrateur.

La narration consiste à utiliser des faits et une trame pour faire passer un message à votre public. Il ne s’agit pas d’un processus, d’une méthode ou d’une technique, mais d’un art qui exige créativité, vision, habileté et pratique. Ce n’est à l’évidence pas simple, mais c’est aussi très gratifiant. « Ce qu’il y a de bien dans la narration, c’est que l’on apprend constamment. C’est ce qui rend le travail des auteurs si intéressant », a expliqué un intervenant.

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Donnez carte blanche à votre équipe de communication

Les administrations douanières n’ont pas toujours à leur disposition des professionnels capables d’écrire des histoires de nature à captiver les lecteurs. Toutefois, les gestionnaires des ressources humaines devraient tenir compte de ce facteur lorsqu’ils mettent sur pied une équipe de communication.

Cette équipe peut être restreinte, mais elle doit bénéficier de la protection de sa hiérarchie et jouir d’une grande autonomie. « La protection est nécessaire parce que les chargés de communication ne sont généralement pas les personnes les plus populaires au sein d’une organisation. L’autonomie est également nécessaire parce que, si vous embauchez des professionnels, vous ne pouvez pas leur dicter ce qu’ils ont à faire. Vous devez plutôt leur donner de l’espace pour créer », a expliqué un intervenant.

Appliquez des connaissances comportementales à la rédaction de messages et de stratégies

Lorsque l’on élabore un plan média et surtout si l’on communique à la radio ou à la télévision, il est impératif de comprendre comment les destinataires consomment les nouvelles et informations : à quelles heures et dans quelles situations ils sont le plus disponibles. En revanche, lorsqu’il s’agit de rédiger des messages et du contenu, il est impératif de comprendre comment les individus se comportent et pourquoi.

Nous aimons nous considérer comme des êtres rationnels qui pèsent soigneusement toutes les options lorsqu’ils prennent des décisions, mais la plupart des comportements humains sont en fait guidés par des processus de pensée automatiques et intuitifs. Or, si vous voulez influencer le comportement par la communication, vous devez comprendre que vous pouvez rencontrer :

  • des crispations : personne ne veut qu’on lui dise comment agir ;
  • du scepticisme : vos interlocuteurs se demanderont si ce que vous voulez qu’ils fassent les aidera vraiment, ou remettront en question tout ce qui n’est pas conforme à leurs convictions ;
  • de l’inertie : même s’ils sont convaincus ou d’accord, les gens peuvent ne pas agir et en rester au stade de l’intention ;
  • un désir de conformité : le comportement des autres influe également sur notre comportement.

Afin d’éviter toute crispation, il est important de faire en sorte que votre auditoire se sente autonome dans ses choix. Autre technique : l’« altercasting », ou glorification, qui consiste à donner à une personne le sentiment d’appartenir à une classe spécifique, afin de l’encourager à se comporter de la manière souhaitée. Vous pouvez aussi offrir certaines possibilités de choix ou demander une certaine forme de réciprocité, c’est à dire commencer par aider la personne puis lui demander quelque chose – il s’agit là d’une méthode qui marche souvent bien.

Pour répondre au scepticisme, il peut être utile de donner à vos interlocuteurs l’impression qu’ils ont le temps de s’adapter et de changer. Les personnes sont plus disposées à planifier des actions pour l’avenir qu’à les réaliser immédiatement. Il peut également être utile de leur demander de présenter des arguments au lieu de leur fournir des informations prêtes à l’emploi.

Face à l’inertie, les solutions peuvent consister à récompenser votre public cible ou à l’aider à planifier et à mettre des choses en place en lui envoyant des rappels ou en lui prodiguant des conseils pratiques. Certaines administrations, par exemple, décernent des prix à leurs « meilleurs clients », en mettant en avant leur professionnalisme ou les initiatives qu’ils ont prises. Cette méthode accélère l’adhésion des personnes ciblées.

Allez plus loin avec les interlocuteurs du secteur privé

Il existe de nombreuses raisons de mettre en place des mécanismes de communication efficaces avec les parties prenantes : assurer un degré élevé de respect des réglementations, s’assurer qu’elles participent à des programmes volontaires tels que les OEA ou encore les encourager à utiliser les outils mis au point à leur intention par une administration.

Toutefois, des représentants du secteur privé ont exprimé leur frustration à l’égard des administrations douanières lorsqu’il s’agit de trouver le bon interlocuteur pour répondre à leurs questions. De nombreuses entreprises ont du mal à trouver de l’information pertinente sur les politiques et les procédures. D’où le nombre élevé d’entreprises qui font appel à des courtiers en douane ou qui ne profitent pas des avantages fiscaux offerts par les accords de libre-échange.

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a recensé trois niveaux d’engagement des parties prenantes :

  • le premier niveau, le plus élémentaire, est celui où l’information est fournie à la demande par l’entremise de centres d’appels, de journées portes ouvertes et de façon proactive par l’entremise de sites Web et de divers médias.
  • le deuxième niveau est celui où une consultation est organisée au moyen de forums et de comités sur des questions spécifiques et assez restreintes. Il est important ici de communiquer clairement au sujet des processus de consultation pour s’assurer que leurs bénéficiaires potentiels sachent qu’ils existent.
  • le troisième niveau, le plus avancé, est celui où les parties prenantes ont la possibilité de s’associer à des fonctionnaires pour co-créer des politiques. Ce dernier niveau illustre l’idée selon laquelle la communication devrait également être utilisée de manière stratégique pour élaborer des politiques. « Trop souvent, la communication se limite à promouvoir l’image du gouvernement ou à diffuser des nouvelles, alors qu’elle pourrait être utilisée pour contribuer à la transparence et encourager la participation de différents acteurs. Un changement de culture s’impose pour corriger cette approche », a expliqué un intervenant.

Utilisez des visuels, mais de manière intelligente

De nos jours, la communication visuelle est le meilleur moyen de capter l’attention du public. Les diapositives remplies de texte ne fonctionnent plus parce que les gens veulent plus de graphiques et moins de mots. Mais les vidéos, les images et les infographies doivent être de bonne qualité. Les éléments graphiques doivent être simples, car votre public n’a pas le temps d’analyser des formes peu familières. Les images doivent véhiculer des émotions ou être conceptuellement fortes. La création de vidéos, la prise de photos ou la conception de visuels doivent être confiées à des professionnels. Un travail de qualité nécessite des compétences.

Les contenus diffusés via les médias sociaux doivent être diversifiés, informatifs, empreints d’émotions et personnels

Les médias sociaux sont gratuits, mais leur bonne utilisation requiert des compétences. Les orateurs ont expliqué que même si les messages sur les politiques ou les initiatives n’obtiennent pas beaucoup de « J’aime » ou ne sont souvent pas partagés, ils n’en sont pas moins importants. Cependant, les médias sociaux doivent être utilisés pour dialoguer avec un public, et pas uniquement pour diffuser des informations telles qu’un document d’orientation. Cela peut supposer de mettre des agents ou une équipe spécifiques sous les feux des projecteurs (les chiens détecteurs sont très populaires) ou de se joindre à la célébration d’événements bien connus tels qu’une journée spéciale, ou de poser des questions aux gens. Le contenu doit être diversifié, informatif, empreint d’émotions et personnel.

Les « chatbots » peuvent être utiles, mais ils ne remplacent pas l’interaction humaine

Les « chatbots » sont des programmes informatiques qui tirent parti de l’apprentissage automatique et de l’intelligence artificielle pour accomplir des tâches tout en imitant la conversation humaine. De plus en plus d’administrations y ont recours pour répondre aux demandes et aux plaintes de leurs citoyens. Ils peuvent également démontrer toute leur utilité sur les sites Web où la navigation est peu aisée ou la réponse à une question simple difficile à trouver. Mais beaucoup considèrent que les chatbots ne peuvent pas tout à fait remplacer l’élément humain, surtout lorsqu’il s’agit de fournir des informations sur des réglementations complexes.

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