Panorama

Transformation numérique : la Douane suisse fait son bilan à mi-parcours

12 octobre 2022
Par l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières (OFDF)

L’Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières (OFDF) est en pleine mutation. Son ambition : la simplification et la numérisation de tous les processus et le renforcement de la flexibilité organisationnelle. DaziT est le nom donné au programme qui fédère les différentes activités entreprises dans ce sens. « Dazi » désigne la douane dans l’une des quatre langues de la Suisse, le romanche, et le « T » final fait référence au concept de transformation. DaziT a été officiellement lancé le 1er janvier 2018 et devrait se conclure fin 2026. Nous sommes donc à mi-parcours. Une bonne occasion de passer en revue les résultats obtenus jusqu’ici.

33 millions de données  

Une des tâches auxquelles s’est attelé l’OFDF a été d’uniformiser et de centraliser les données de base via une solution de gestion des données de référence (Master Data Management). Le modèle de données utilisé jusqu’à présent a  été simplifié, optimisé et complété. Plus de 30 000 données de partenaires commerciaux et environ 33 millions de données spécifiques à la douane ont ensuite été rassemblées, telles que les codes tarifaires ou les taux de droits de douane. « C’est un record mondial », raconte Thomas Eggimann, le responsable du projet. « Nous gérons activement et au jour le jour un million de données. Nous pouvons désormais les exploiter plus facilement ».

Plus important encore, des processus de travail stricts ont été mis en place pour augmenter la qualité de gestion de ces données. La nouvelle solution permet également aux clients de l’OFDF d’adapter leurs propres données de manière autonome – où qu’ils soient, 24 heures sur 24. « La nouvelle gestion centralisée garantit la qualité et la fiabilité des données. Elle établit une base solide pour les autres projets du programme DaziT et les nombreuses initiatives de l’administration fédérale », résume Thomas Eggimann.

Activation automatique

L’activation automatique est un élément-clé du nouveau processus douanier digitalisé de bout en bout qui est progressivement mis en place dans le cadre du programme DaziT. À ce stade, deux applications, Periodic et Activ, ont été développées afin de mieux gérer les déclarations périodiques (facilités accordées au trafic régional de chargements de nature uniforme importés régulièrement et par le même bureau de douane) et les déclarations de transit international. Le principe est le suivant : la déclaration de marchandises est complétée par une déclaration du moyen de transport et reliée à celle-ci par le biais de l’une des deux applications.  La déclaration de marchandises n’est toutefois activée, c’est-à-dire ne devient juridiquement contraignante, que lorsque le moyen de transport qui achemine la marchandise est géolocalisé dans une des zones délimitées à proximité d’un point de franchissement de la frontière grâce à l’un des 64 dispositifs de repérage géographique qui y ont été installés. Une analyse des risques est ensuite effectuée. À la fin du processus d’analyse, le chauffeur est averti s’il peut continuer sa route ou si un contrôle est nécessaire.

Depuis le lancement des applications pour smartphone Activ et Periodic en 2019, plus de 100 000 entrées ou transits en Suisse ont fait l’objet d’une activation automatique. La tendance est à la hausse et le potentiel de croissance est considérable : chaque jour, plus de 20 000 camions passent la frontière suisse.

Télématique

© FOCBS
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Avec les solutions actuelles, le chauffeur du camion doit avoir un smartphone allumé et connecté à un réseau téléphonique, et lancer manuellement le processus. Une technologie permettrait une automatisation complète : la télématique.

Une grande partie des entreprises de transport utilise déjà la télématique embarquée dans les camions pour optimiser la gestion de leur flotte. Cela leur permet de collecter, via des opérateurs de télématique, des données telles que la localisation et la vitesse des véhicules, ou encore les temps de pause de leurs chauffeurs.

La Douane n’aurait besoin que d’une infime partie de ces données pour rendre possible l’activation automatique des déclarations douanières. Elle devrait juste pouvoir repérer, grâce à la géolocalisation, quand un véhicule transportant les marchandises déclarées entre dans la zone frontalière délimitée. Techniquement, une simple interface aux logiciels des opérateurs de télématique permettrait cet échange de données. La Douane suisse travaille également à des solutions complémentaires, par exemple pour signifier à un chauffeur qu’il peut continuer sa route ou qu’il doit subir un contrôle. Un test pratique effectué à l’automne 2021 a confirmé le potentiel des outils développés.

L’activation automatique via la télématique ne se limite pas au transport routier. Des solutions techniques pour d’autres moyens de transport sont à l’étude. Sur l’eau, il est prévu de mettre en place l’activation via RPIS, un système de gestion du transport fluvial qui repose également sur la télématique. Pour le rail, l’activation automatique est envisagée via ZIS, la plateforme de télématique embarquée des Chemins de fer fédéraux. Enfin, l’activation par voie aérienne pourrait être liée aux systèmes de gestion de fret aérien.

© FOCBS
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Une multitude de services numériques

Au cours des quatre premières années du programme DaziT, l’OFDF a mis en service une trentaine d’applications et de services informatiques. Leur utilisation est en constante augmentation, comme le montrent les exemples suivants :

  • 33% : l’augmentation du paiement de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP) collectée auprès des camions étrangers via le service européen de péage électronique (SET). Depuis janvier 2020, plus d’un demi-million de trajets à travers la Suisse ont été facturés au moyen du SET bien que seuls deux prestataires certifiés par l’OFDF proposent cette nouvelle solution.
  • 65 %: le pourcentage des chauffeurs de bus et de camping-cars qui choisissent désormais la voie numérique pour s’acquitter de la redevance forfaitaire sur les poids lourds (RPLF) via l’application pour smartphone App Via. Élue «Best of Swiss Apps» , l’application a été utilisée plus de 60 000 fois depuis son lancement au printemps 2019.
  • 99 %: le pourcentage de l’impôt sur la bière en Suisse et dans la Principauté de Liechtenstein prélevé par voie numérique. Après les grandes et moyennes brasseries, ce sont désormais les petits brasseurs qui, pour la plupart, déclarent leur production de bière par voie électronique au moyen de l’application Biera. Les déductions sont calculées automatiquement. Les remboursements se font également par voie numérique.
  • 100 000 : le nombre de déclarations de marchandises par les voyageurs réalisées via QuickZoll a dépassé cette barre symbolique. En 2021, environ 10 % de toutes les recettes issues du trafic voyageurs ont été encaissées via cette application pour smartphone.

Mobilité et flexibilité

La transformation ne se limite pas à la numérisation, loin de là. L’OFDF en tant qu’organisation va fondamentalement changer pour se transformer en une organisation plus légère et plus flexible. La réorganisation est centrée sur un profil professionnel unique qui remplace les professions actuelles de garde-frontière et de spécialiste de douane. Les nouveaux collaborateurs seront tous formés au contrôle des marchandises, des personnes et des moyens de transport et se spécialiseront ensuite dans l’un de ces domaines. Des formations correspondantes seront proposées aux collaborateurs déjà en service. Il s’agira pour ces derniers de compléter les compétences acquises de manière ciblée et en mettant l’accent sur la pratique.

L’automatisation de certaines tâches va par ailleurs permettre au personnel de se concentrer sur les contrôles et sur les prestations ayant une valeur ajoutée pour la clientèle. Les moyens de travail et d’engagement vont en outre être modernisés. Le personnel est équipé d’appareils de communication mobiles (smartphones, ordinateurs portables). Les véhicules d’intervention seront aménagés conformément à la nouvelle stratégie de la flotte, c’est à dire avec des instruments de contrôle et une infrastructure informatique mobiles, de façon à offrir des postes de travail multifonctionnels.

Parmi les services informatiques visant à renforcer la mobilité du personnel et la flexibilité du travail figurent :

  • l’application EneXs Mobile qui permet de consulter différentes bases de données d’avis de recherche relatifs à des personnes ou objets sur Smartphone.
  • la télématique et le carnet de route numérique dont 93 % des véhicules d’intervention sont déjà équipés.
© FOCBS
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Communication

La transformation de l’OFDF se fait dans le cadre d’un échange intense avec de nombreuses organisations partenaires et parties prenantes. Des discussions avec les administrations douanières des pays voisins et les autorités européennes sont en cours afin de simplifier et d’accélérer le franchissement de la frontière. L’échange avec les entreprises et les associations économiques se fait au sein du groupe d’accompagnement Économie ainsi que des divers groupes de travail. Les cantons et les organisations de sécurité sont aussi régulièrement informés.

Voici quelques chiffres qui donnent une idée du volume de ces échanges depuis le lancement du programme DaziT : 90 séances d’information pour les cadres et les collaborateurs, 13 rencontres avec le groupe d’accompagnement économie, 50 rencontres avec les associations du personnel, 40 réunions officielles de concertation avec les États voisins et la Direction Générale Fiscalité et Union Douanière.

Deuxième mi-temps

La deuxième mi-temps dans la mise en œuvre de DaziT a débuté avec deux étapes importantes qui devraient être franchies dans les mois qui viennent : l’adoption par le Conseil fédéral (gouvernement) du « message sur la révision totale du droit douanier » et l’introduction du système d’entrée/de sortie (EES) développé par la Commission européenne pour la saisie électronique des entrées et des sorties des ressortissants d’États tiers à l’espace Schengen.

Une autre étape majeure sera franchie au courant de l’été 2023 avec la mise en service de la première version du nouveau système de circulation des marchandises appelé Passar. Les premières années de DaziT ont vu la mise sur le marché de plusieurs applications très spécifiques qui améliorent certaines étapes de la déclaration en douane pour les secteurs directement touchés, mais n’ont pas encore permis de réaliser tout le potentiel de simplification et d’accélération du trafic de marchandises transfrontalier. Passar, qui remplacera progressivement les systèmes existants « NCTS » (transit et exportation) et « e-dec » (importation et exportation), permet d’effectuer un pas considérable dans cette direction. En plus de fusionner les deux systèmes, il s’agit de simplifier, d’harmoniser et de numériser l’ensemble des processus généraux de déclaration douanière. La transition sera étroitement préparée en coordination avec les milieux économiques et avec les fournisseurs de logiciels. Un groupe de travail « Développement de logiciels » a été créé pour faciliter le travail de ces derniers.

D’autres projets importants tels que l’introduction d’une solution de traitement des cas et de rapport uniforme pour l’ensemble de l’OFDF, l’introduction de la vignette électronique, la réalisation de projets immobiliers et la poursuite de la promotion de la transformation culturelle seront également au cœur des préoccupations de l’Office fédéral dans les mois qui viennent.

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www.dazit.admin.ch