Dossier

De la réaction à l’action, pour un monde plus sûr et plus prospère

17 juin 2020
Par Ricardo Treviño, Secrétaire général adjoint de l’OMD

Depuis décembre 2019, lorsque les premiers cas d’infection ont été relevés, l’épidémie de coronavirus (COVID-19) s’est répandue à travers le monde avec des conséquences dramatiques pour les personnes, les gouvernements et les entreprises. Même si nous ne pourrons tirer un bilan plus complet des répercussions de cette crise sanitaire que dans quelques mois, la plupart des experts s’accordent à dire qu’elle aura bel et bien des effets sur le long terme.

Nous ne pouvons que rendre hommage à tous les professionnels qui, malgré les risques encourus, ne ménagent pas leurs efforts pour aider nos communautés à relever l’un des plus grands défis que nous ayons eu à affronter au cours des dernières décennies. Certains, comme le personnel des services de santé et les prestataires de soins, honorent pleinement leur engagement à lutter contre le virus en mettant leur propre sécurité en danger pour mener à bien leur mission. D’autres ont suivi leur exemple, notamment pour s’assurer que les besoins fondamentaux des personnes soient assouvis. Les administrations des douanes, elles aussi, continuent d’offrir leurs services durant cette période particulièrement difficile pour garantir la fourniture ininterrompue de marchandises, notamment d’équipements médicaux indispensables, et pour empêcher que les contrebandiers, les contrefacteurs et les délinquants ne puissent faire entrer des produits illicites, voire parfois dangereux sur le marché.

Un jour viendra où nous vaincrons cette pandémie et où les femmes et les hommes partout dans le monde pourront reprendre normalement leurs activités. Cela étant, la crise actuelle devrait amener les principaux acteurs de la société, en particulier ceux qui sont impliqués dans la gestion de la chaîne logistique internationale, à réfléchir de manière approfondie à la façon dont nous pouvons mieux réagir face aux pandémies à l’avenir.

Niveau de préparation à l’échelon mondial

Pas plus tard qu’en septembre 2019, le Conseil mondial de suivi de la préparation (Global Preparedness Monitoring Board ou GPMB), co-organisé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Banque mondiale, publiait son premier rapport annuel sur le niveau de préparation mondiale face aux urgences sanitaires, sous le titre « Un monde en péril ». Dans l’avant-propos du rapport, on peut lire ce qui suit : « En matière de pandémies, nous avons depuis trop longtemps laissé évoluer un cycle de panique et de négligence : nous renforçons les efforts quand une grave menace se présente, puis les relâchons rapidement quand elle s’atténue. Il est grand temps d’agir. » Cet appel doit être lu en regard du fait que l’OMS a répertorié 1 483 épisodes épidémiques dans 172 pays entre 2011 et 2018 et que des recommandations spécifiques ont été formulées pour accroître le niveau de préparation tout au long de cette période.

Les évolutions de la situation depuis décembre 2019 montrent que le postulat de l’OMS était fondé : les décisions ont été prises à un moment où le virus représentait déjà une sérieuse menace alors qu’un niveau de préparation plus élevé pour combattre la pandémie aurait résolument permis d’apporter des réponses plus efficaces et d’obtenir de meilleurs résultats. En général, une meilleure préparation face aux menaces cycliques ou émergentes, passant notamment par des plans d’action clairs et des mécanismes de coordination à déployer lorsque la menace apparaît, permettrait aux pays de réagir plus efficacement face à de telles crises.

Des politiques et des mesures réalisables

Les pandémies font partie des grands risques que doivent affronter les sociétés humaines au niveau mondial mais elles ne sont certainement pas les seules : il convient d’y ajouter les catastrophes naturelles, les conflits armés, les cyberattaques et, plus généralement, l’abus des nouvelles technologies à des fins délictueuses. C’est une chose que de prendre acte de ces menaces au niveau mondial mais l’adoption de politiques et de mesures concrètes pour y remédier semble toujours avoir posé un problème épineux pour les pouvoirs publics.

Agence exécutive chargée de suivre la stratégie gouvernementale, la douane déploie souvent sa mission sous la pression exercée par ces mêmes pouvoirs publics afin qu’elle atteigne les objectifs qu’ils se sont fixés, notamment au niveau financier. Elle travaille également dans un environnement complexe et, lorsqu’elle adopte des mesures ou des réformes, elle doit tenir compte des préoccupations et des contraintes d’un large éventail de parties prenantes, notamment des interlocuteurs du secteur privé.

La douane est bien placée pour savoir quels sont les leviers politiques, les ressources, les règlements ou les dispositifs opérationnels qu’il convient d’actionner pour y arriver. Comme indiqué dans le chapitre 3 du Recueil de l’OMD visant à développer le renforcement des capacités, consacré à la gestion stratégique : « Il importe donc que les décideurs s’assurent que la douane nationale est bien impliquée dans l’étape de développement politique et stratégique. L’implication de la douane dans ce processus permet de garantir qu’elle comprend et influence la politique choisie, et se trouve donc en meilleure position pour la mettre en œuvre. »

Toutefois, avant de pouvoir être impliqué dans le dialogue politique, il est impératif de s’informer pour comprendre l’environnement dans lequel on évolue, les tendances émergentes qui le caractérisent et les menaces et les opportunités qu’il présente. À cet égard, le Secrétariat de l’OMD publie chaque année une étude de l’environnement douanier afin d’aider ses Membres à comprendre les évolutions sociales, politiques, économiques, technologiques et juridiques ainsi que leur incidence éventuelle sur la façon dont les douanes mènent leur mission.

Des liens plus étroits

Lors des futures sessions de la Commission de politique générale et du Conseil, les Membres de l’Organisation seront appelés à entériner une proposition visant à établir un lien plus étroit entre l’étude de l’environnement douanier et le Plan stratégique de l’OMD. L’idée est de rendre la stratégie de l’OMD plus pertinente par rapport aux évolutions intervenant sur le plan politique, socioéconomique, technologique et juridique.

Le Plan stratégique 2022-2025 sera rédigé suivant le même processus participatif qui a été utilisé pour la préparation du plan précédent. Ce processus sera mené tout au long des exercices 2020-2021 et 2021-2022. Les Membres de l’OMD seront instamment invités à dialoguer les uns avec les autres et avec le Secrétariat afin que, ensemble, nous puissions arriver à une stratégie globale qui tienne compte des diverses priorités actuelles ainsi que des risques et des défis émergents, en utilisant les méthodes de prospective, ce qui nous permettra de passer d’une démarche réactive à une approche fondée sur l’action.

Mise en œuvre et soutien à haut niveau

De nombreuses administrations semblent considérer le Plan stratégique comme un document qui n’engage que le Secrétariat. Ce ne devrait pourtant pas être le cas. La crise de COVID-19 place la communauté douanière internationale face à des défis imprévus. Elle nous a permis de clarifier les dispositions de certains de nos instruments et a mis en évidence à quel point il est important d’accélérer la modernisation de nos processus. Elle a également clairement montré que de nombreuses orientations et normes adoptées à l’échelon international, notamment celles qui portent sur la gestion des catastrophes naturelles, ne font toujours pas partie intégrante des politiques nationales ou ne sont pas mises en œuvre de manière adéquate.

Il est donc impératif que les méthodes de travail, les pratiques et les normes préconisées soient bel et bien appliquées. Bien que certaines initiatives adoptées au niveau de l’OMD n’aient volontairement pas été prises en compte par les divers gouvernements au moment de définir et d’élaborer leurs politiques, comme les instruments mis au point pour assurer un échange automatique d’informations, d’autres initiatives exigent simplement d’être mieux comprises et de bénéficier d’un soutien de haut niveau pour être appliquées.

Conclusion

En améliorant sa stratégie et en la corrélant davantage avec les tendances émergentes, l’OMD, en tant qu’organisation exprimant la voie de la communauté douanière internationale, sera plus à même de remplir son rôle de chef de file. En effet, plus la stratégie sera pertinente, plus elle incitera les Membres à la suivre. Ensemble, l’OMD et ses Membres pourront passer de la réaction à l’action, pour un monde plus sûr et plus prospère.

En savoir +
http://www.wcoomd.org/fr/about-us/what-is-the-wco/strategic-plan.aspx