Focus

Convention de Kyoto révisée: vers une plus grande simplification et harmonisation des procédures douanières

22 juin 2020
Par Phuntsho Dorji, Direction du Contrôle et de la Facilitation, Secrétariat de l'OMD

La Convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers, connue sous le nom de Convention de Kyoto, a été adoptée le 19 mai 1973 et est entrée en vigueur le 25 septembre 1974 avec 63 Parties contractantes. Vingt ans plus tard, en 1994, il a été décidé de la réviser, et, en juin 1999, la Convention de Kyoto révisée (CKR) a été adoptée. Elle est entrée en vigueur le 3 février 2006 après que 40 Parties contractantes à la Convention de Kyoto originale aient ratifié le Protocole d’amendement. En février 2020, la CKR comptait 122 parties contractantes.

Globalement, la CKR vise à développer des procédures douanières prévisibles et transparentes basées, entre autres, sur l’utilisation des technologies de l’information, la gestion des risques, une approche coordonnée des contrôles avec les autres agences officielles et les partenariats avec le secteur privé. La Convention est constituée de trois parties: le corps de la Convention, une Annexe générale comprenant 10 chapitres et 10 Annexes spécifiques. L’Annexe générale est contraignante pour les Parties contractantes et les dispositions ne peuvent faire l’objet d’aucune réserve. Les Annexes spécifiques de la CKR contiennent des Normes et des pratiques recommandées concernant d’autres aspects des procédures douanières. Les Parties contractantes peuvent accepter une ou plusieurs Annexes spécifiques et émettre des réserves par rapport aux pratiques recommandées.

Examen de la CKR: logique et portée

Cela fait à présent 20 ans que le Conseil de l’OMD a adopté la CKR en 1999. Bien qu’aucun amendement n’ait été réalisé à ce jour, des Directives détaillées relatives à l’Annexe générale et aux Annexes spécifiques de la CKR ont été développées dès le début en vue d’appuyer sa mise en œuvre. Beaucoup de ces Directives ont été mises à jour, notamment celles sur « l’application de la technologie de l’information et de la communication » et sur le « trafic postal ». En outre, afin de compléter la CKR, l’OMD a développé plusieurs outils pour répondre à des changements importants survenus dans l’environnement commercial qui ont eu un impact sur la communauté douanière, tel que le Cadre de normes SAFE visant à sécuriser et faciliter le commerce mondial, le Cadre de normes pour le commerce électronique transfrontalier, le Recueil de l’OMD sur le Guichet unique et le Modèle de données de l’OMD.

Parce qu’il reconnaît la nécessité de s’assurer que la CKR reste le schéma directeur pour des procédures douanières modernes et efficaces et reflète l’évolution rapide du commerce international et des progrès technologiques, le Comité de gestion de la CKR (CG/CKR), à savoir l’organe de travail de l’OMD au sein duquel les Parties contractantes à la CKR se réunissent pour gérer, réviser, amender et mettre à jour la Convention, a commencé en 2016 à échanger des vues sur la possibilité d’un examen éventuel de la CKR. Ensuite, sur la base des recommandations du CG/CKR, les sessions de la Commission de politique générale et du Conseil de l’OMD de juin 2018 ont approuvé la création d’un groupe de travail dédié à un examen complet de la CKR. L’examen de la CKR a pour objet de couvrir la structure et le contenu du corps de la Convention, l’Annexe générale, les Annexes spécifiques et les Directives, en tenant compte du travail déjà réalisé par le Groupe de travail virtuel qui avait été créé par le CG/CKR en 2015.

Perspective stratégique

Lors des sessions du Conseil de l’OMD de 2019, les Membres ont adopté le nouveau Plan stratégique pour 2019-2022 qui comprend neuf priorités sur lesquelles l’OMD devra concentrer ses travaux. L’une d’entre elles est la CKR. L’examen de l’environnement douanier 2019 (voir encadré 1), réalisé par le Secrétariat de l’OMD, fournit une vue d’ensemble des principales tendances internationales ayant un impact sur le commerce et une incidence potentielle sur les rôles, politiques et pratiques de la douane.

Tendances ayant une incidence sur le commerce international
  1. Un environnement commercial en pleine mutation: augmentation du commerce des services et des biens immatériels, évolution des modèles commerciaux, débats autour de la notion de multilatéralisme dans le commerce et résurgence des frontières nationales ;
  2. Prédominance de la sécurité dans les politiques publiques;
  3. Développement du commerce électronique;
  4. Vers une économie numérique;
  5. Sensibiliser le public au changement climatique et à la société durable.

Dans le cadre du processus d’examen de la CKR, plusieurs principes et questions de base ont été identifiés par les Membres, notamment:

  • l’importance récurrente de promouvoir des procédures douanières modernes et efficaces pour faciliter le commerce licite et garantir la sécurité;
  • l’importance et la force du caractère contraignant de la CKR, ainsi que la nécessité d’avoir un mécanisme de révision intégré et périodique;
  • la nécessité de disposer d’un mécanisme de mise en œuvre robuste, soutenu par une assistance technique et un renforcement des capacités utilisant l’expertise de l’OMD;
  • la nécessité de refléter l’utilisation extensive de la communication électronique des données pour l’ensemble des procédures et des fonctions douanières et le besoin de mettre en oeuvre le concept de pipeline de données et d’en tirer pleinement parti par le biais de l’analyse de données et de l’utilisation des technologies avancées telles que la chaîne de blocs et l’intelligence artificielle.

Notions et propositions

Depuis septembre 2018, le Groupe de travail en charge de l’examen complet de la CKR (GT-CKR) a tenu sept réunions au cours desquelles 179 propositions (132 en provenance des Membres de l’OMD et 44 des parties prenantes externes) ont été formulées et classées en 37 notions. 21 Membres ont soumis des propositions, principalement au cours des 2ème (42 propositions) et 4ème (37 propositions) réunions du GT-CKR tel que cela est illustré dans le graphique 2.

La participation des parties prenantes externes aux réunions du GT-CKR a pris effet à partir de la 5ème réunion et leur nombre est passé de 9 à 13 tel qu’indiqué dans le graphique 3. À la 6ème  réunion du GT-CKR, les parties prenantes externes ont soumis un total de 44 propositions.

Le graphique 4 indique comment les notions et les propositions sont structurées et filtrées. Les 37 notions générales ont été classées en suivant la structure de la CKR, à savoir : Corps, Annexe générale et Annexes spécifiques (voir graphique 4).

Méthode évolutive proposée

Le GT-CKR a développé une méthode à quatre voies, tel que cela est illustré dans l’encadré 2 afin d’examiner et d’évaluer les propositions soumises par les Membres et les parties prenantes externes. La voie D indique un niveau élevé de maturité, la voie A qu’il s’agit d’une proposition relativement mûre qui nécessite seulement quelques ajustements mineurs. Dans le cas de la voie B, les propositions doivent faire l’objet d’améliorations supplémentaires et des informations supplémentaires doivent être fournies par l’initiateur de la proposition, en fonction des préoccupations soulevées ou des commentaires formulés par le GT-CKR. Si l’initiateur de la proposition ne l’enrichit pas ou n’est pas en mesure de l’améliorer de manière significative ou de la développer plus en avant avec les informations requises, après un certain laps de temps, elle se retrouvera probablement dans la voie C et sera considérée comme non active. 170 des propositions ont déjà été classées dans une de ces voies (voir graphique 5).

Composition de la proposition

Le graphique 6 indique le nombre de propositions soumises par les Membres et les parties prenantes externes selon les notions auxquelles elles se rapportent. Les notions qui ont reçu le plus de propositions sont: Suivi, rapport et évaluation – 9 propositions; Utilisation des technologies de pointe – 10 propositions; Problèmes de données – 10 propositions; Déclarations électroniques – 8 propositions; Opérateur économique agréé (OEA) – 9 propositions; Contrôle douanier – 16 propositions; Règles d’origine – 12 propositions; et Gestion coordonnée des frontières – 10 propositions.

Pour expliquer brièvement le contenu des propositions et la façon dont elles sont formulées, les propositions relatives à la notion de « Suivi, rapports et évaluation » visent à introduire un dispositif de suivi, de rapport et d’évaluation de la mise en œuvre et du respect de la CKR par les parties contractantes. Les propositions en lien avec la « Pérennisation » comprennent, entre autres, le fait d’intégrer une révision périodique de la CKR. Plusieurs propositions concernent l’utilisation des technologies avancées telles que la chaîne de blocs, l’intelligence artificielle, le matériel d’inspection non intrusif et l’impression en 3D. Plusieurs autres propositions se réfèrent à des questions importantes telles que l’interopérabilité des données et des systèmes. Les propositions relatives à la sécurité et à la gestion des risques figurent sous la notion « Contrôle douanier ». S’agissant de la « Gestion coordonnée des frontières », les propositions portent principalement sur la coordination et la coopération, ainsi que le Guichet unique.

Pour ce qui est des notions d’une nature plus technique, les propositions relatives aux « Règles d’origine » visent à renforcer l’Annexe spécifique K et couvrent, entre autres, l’auto-certification, la règle du transport direct, les règles d’origine préférentielles et non-préférentielles des marchandises. Les propositions relatives aux questions de commerce électronique et à la poste figurent sous les notions d’ « Envois accélérés/express » et de « Trafic postal ». Le reste des propositions concernent principalement les procédures, formalités, transactions électroniques, mesures et exigences/procédures spécifiques relatives à plusieurs sujets indiqués explicitement dans le titre de la notion à savoir: « Zones franches »; « Entrepôts », « Voyageurs » et « Envois de secours ».

La voie à suivre

Suite à des échanges de vues soutenus concernant la voie à suivre par rapport au processus d’examen de la CKR, le CG/CKR, en tenant également compte du processus d’amendement de la CKR, a décidé que l’examen de la CKR se ferait dans le cadre d’une démarche en quatre étapes décrite dans le graphique 7 (cliquez sur l’image pour l’agrandir).

Le calendrier pour la réalisation et la finalisation du processus d’examen de la CKR pourrait s’étendre jusqu’à janvier 2023, dans les meilleurs délais. L’étape 1 consistant à soumettre les propositions et élaborer les recommandations est déjà en cours et une réunion supplémentaire du GT-CKR devra se tenir pour élaborer les recommandations et finaliser tous les travaux. Ensuite, le CG/CKR se chargera de terminer les travaux d’examen de la CKR en suivant les étapes 2, 3 et 4. L’étape 2, à savoir l’évaluation des recommandations élaborées par le GT-CKR, sera réalisée par rapport à la CKR et ses Directives, ainsi qu’aux outils et instruments de l’OMD existants. Une évaluation supplémentaire sera réalisée pour déterminer si un amendement de la CKR est requis ou pas, et/ou si le développement de nouveaux instruments ou outils est nécessaire ou pas. Dans le cadre de l’étape 3, les recommandations filtrées dans le cadre de l’étape 2 seront testées par rapport à des critères avalisés par le CG/CKR afin de déterminer quelles sont les recommandations qui nécessiteront un amendement éventuel de la CKR. Si la recommandation réussit à franchir les étapes précédentes, les propositions d’amendement seront développées et soumises au processus d’amendement stipulé aux articles 6 et 15 de la CKR dans le cadre de l’étape 4.

Conclusion

L’examen de la CKR sera certainement bénéfique tant pour les pays développés que pour les pays en développement. Pour les pays en développement, la nature contraignante de la CKR encourage et appuie la réforme douanière et l’établissement d’un cadre juridique adéquat, le but étant de créer de meilleures opportunités d’accès aux marchés, d’améliorer le climat des investissements et de faciliter le commerce dans le pays concerné. Pour les pays développés, cela signifie plus d’opportunités pour leurs opérateurs en termes d’accès aux marchés et  l’assurance d’une prévisibilité de l’environnement légal et opérationnel.

Afin de suivre les avancées dans ce domaine, les Membres de l’OMD sont invités à consulter les pages du site de l’OMD consacrées au GT-CKR et au CG/CKR.

En savoir +
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phuntsho.dorji@wcoomd.org