Dossier: Destination données

Quelques mots à propos du thème de 2022

24 février 2022
Par Kunio Mikuriya, Secrétaire général de l’OMD

Chaque année, le Secrétariat de l’OMD choisit un thème qu’il estime pertinent pour la communauté douanière et ses partenaires. En 2022, il invite les administrations douanières à « accélérer la transformation numérique de la douane en développant une culture de la donnée et un écosystème performant ».

« Transformation numérique » est une expression fourre-tout utilisée pour décrire la mise en œuvre de nouvelles technologies et de nouveaux processus pour améliorer les opérations. La culture des données, en termes simples, signifie une culture organisationnelle qui donne la priorité à la prise de décision basée sur les données. Elle permet aux gens de poser des questions, de remettre en question des idées et de s’appuyer sur des informations concrètes et pas seulement sur l’intuition ou l’instinct pour prendre des décisions. Une telle culture doit être couplée à un écosystème de données performant. Le terme fait référence aux langages de programmation, aux algorithmes, aux services et à l’infrastructure générale qu’une organisation utilise pour identifier les sources de données, ainsi que pour collecter, stocker, transformer et analyser les données.

Certaines des actions habilitantes sans lesquelles il sera impossible de réaliser la transformation souhaitée sont les suivantes :

  • établir une gouvernance des données formelle pour assurer l’accès à des données pertinentes et exactes en temps opportun, et ainsi renforcer la confiance dans les données ;
  • recourir aux normes mises au point par l’OMD et d’autres institutions concernant le format des données et l’échange de données ;
  • assurer la gestion adéquate des données pour garantir que les bonnes personnes aient accès aux bonnes données et que la règlementation de protection des données soit respectée ;
  • adopter des démarches innovatrices, en utilisant, par exemple, des outils analytiques, pour rassembler les données et les exploiter à leur plein potentiel en vue d’étayer la prise de décisions ;
  • améliorer la connaissance des données du personnel, c’est-à-dire la capacité du personnel à interpréter et analyser les données avec précision ;
  • mettre les données à disposition du public et des milieux universitaires dans un effort visant à renforcer la transparence, à stimuler la création de connaissances et à favoriser le dialogue avec la société civile.

Stratégie de l’OMD en matière de données

Tous les Membres de l’OMD sont riches en données, mais une grande majorité d’entre eux manquent de ressources et de compétences pour devenir des organisations axées sur les données et mettre en œuvre les actions mentionnées ci-dessus. Pour les aider, le Secrétariat de l’OMD a inscrit des thèmes en lien avec les données à l’ordre du jour de nombreux comités et groupes de travail, a organisé des séminaires de sensibilisation, a mis au point des modules d’e-learning, a élaboré un Cadre de renforcement des capacités pour l’analyse des données, et, enfin, a publié des ouvrages et plusieurs articles dans l’OMD Actu.

De plus, une équipe d’experts a été créée dans le cadre du Projet baptisé BACUDA qui rassemble des douaniers et des scientifiques des données dans le but de mettre au point des méthodologies d’analyse des données, notamment des algorithmes dans des langages de programmation de source ouverte.

Le Secrétariat continue également à étudier la manière de collecter et de partager les données sur les administrations douanières dans le but d’améliorer la façon dont il exécute ses activités de renforcement des capacités, dont il réalise les évaluations fondées sur les données, et dont il travaille avec les experts internationaux pour répondre aux demandes d’assistance.

Depuis septembre 2021, le Secrétariat travaille à l’élaboration d’une stratégie visant à :

  • assurer la cohérence entre les initiatives de l’OMD liées aux données et élaborer une vision institutionnelle sur les données ;
  • faire de l’OMD une plaque tournante pour les statistiques douanières et la connaissance des pratiques, stratégies et technologies liées aux données appliquées à la douane ;
  • formuler des recommandations fondées sur des données probantes dans le cadre de l’assistance technique et du soutien au renforcement des capacités ;
  • refléter la diversité des utilisations des données douanières et adopter une perspective holistique en allant au-delà du domaine traditionnel du ciblage, vers le contrôle a posteriori, l’optimisation des ressources, la lutte contre la corruption, l’évaluation d’impact et le soutien à l’élaboration des politiques.
  • préparer l’OMD et ses Membres à une gouvernance ouverte, c’est-à-dire une gouvernance mettant en pratique les principes de transparence, de participation et de responsabilité. Selon ce concept, les données générées par les services publics sont des « biens communs ».

La stratégie de l’OMD en matière de données a été élaborée autour de trois éléments constitutifs, à savoir le partage des données, la création de communautés de praticiens, et l’assistance aux Membres dans leur transition vers des organisations axées sur les données. Le document de stratégie aborde également les défis relatifs à la mise en œuvre et met en évidence les questions à discuter. Un aperçu du contenu de la Stratégie a été présenté lors de la session de décembre 2021 de la Commission de politique générale et il a reçu des commentaires positifs de la part des Membres. Un document plus élaboré sera présenté lors des sessions du Conseil de juin 2022 pour discussion et, je l’espère, approbation.

Contenu du Dossier

Permettez-moi maintenant de présenter le contenu de ce dossier. Il commence par un article du Secrétariat sur le Modèle de données de l’OMD, véritable langage commun pour les processus liés à la gestion des frontières qui permet aux informations de circuler entre différents systèmes informatiques. L’article se concentre sur les dernières exigences en matière de données et processus qui ont été inclus dans le Modèle grâce à la collaboration avec les parties prenantes des secteurs du transport maritime, de la sécurité alimentaire, de la gestion des déchets et de la poste. En outre, il offre des conseils pratiques aux administrations des douanes qui envisagent d’adopter le modèle et invite les opérateurs économiques à l’utiliser également dans leurs documents commerciaux car il couvre certains des éléments de données que l’on retrouve dans ce type de documents, comme les factures, les listes de colisage ou encore les connaissements.

Suit un article du Botswana Unified Revenue Service qui présente divers projets traitant de la collecte, de l’analyse et du partage des données. L’auteur y souligne qu’une culture de l’innovation a émergé au sein de l’Administration et que l’environnement de travail favorise une pensée créative et l’émergence de produits, services et processus nouveaux ou améliorés.

Le troisième article porte sur les résultats et les enseignements tirés de la première « enquête internationale sur les administrations douanières » (ISOCA) qui est cogérée par l’OMD et le FMI dans le but de collecter des données quantitatives et permettre de comparer les pays partageant des points communs. Un plus grand nombre de participants est nécessaire pour que l’enquête fournisse une vue globale des rôles joués par les administrations et de leurs pratiques. J’espère que davantage d’administrations participeront à la prochaine édition de l’enquête qui sera simplifiée pour trouver un meilleur équilibre entre le besoin de données précises et la charge de la collecte des données.

Dans un quatrième article, la Douane de la République dominicaine présente les outils qu’elle a développés pour mesurer le temps nécessaire à la mainlevée des marchandises et l’impact du programme « mainlevée en 24 heures » dont l’objectif est de soutenir les ambitions gouvernementales de faire de la République dominicaine l’épicentre logistique de la région des Caraïbes.

L’article suivant nous emmène au Niger, où l’Administration des douanes a récemment commandité une étude visant à analyser les flux commerciaux transfrontaliers en s’appuyant sur l’imagerie satellitaire. L’article présente les informations qui ont ainsi été collectées et explique comment elles vont lui servir à réorganiser ses services opérationnels et parvenir à un maillage efficace du territoire.

Le dernier article de ce Dossier met en lumière la nécessité d’une harmonisation dans la numérisation des documents commerciaux. Écrit par l’ICC, cet article explique l’initiative sur les normes numériques, un effort collaboratif intersectoriel qui a pour but de faire progresser la numérisation du commerce à l’échelle mondiale.

De nombreux autres articles publiés dans ce numéro d’OMD Actu traitent directement ou indirectement des données et du rôle que jouent les technologies de l’information pour nous rendre plus efficaces. Et cela est vrai pour toutes les éditions de notre magazine. Vous l’avez entendu ou lu plusieurs fois et partout : dans le monde d’aujourd’hui, tout tourne autour des données. Les données sont stratégiques et nous avons tous à gagner en partageant notre expérience et notre expertise sur la meilleure façon de les gérer de manière holistique.