Éliminer les produits de contrefaçon à travers le recyclage : la nouvelle mesure de la Douane de Dubaï qui change la donne
12 octobre 2022
Par la division DPI de la Douane de Dubaï
La question de l’élimination ou de la destruction de produits portant atteinte aux droits de propriété intellectuelle (DPI), de manière adéquate et respectueuse de l’environnement et dans la lignée de la législation en vigueur en matière d’environnement et de santé publique, a été évoquée à de nombreuses reprises lors de nombreuses réunions de l’OMD ainsi que dans les pages de ce magazine.
À Dubaï, pendant longtemps, l’autorité douanière n’avait d’autre choix que de demander la réexportation de ces produits vers leur point d’origine car l’émirat n’avait pas la capacité de les détruire en bonne et due forme et sans le moindre effet sur l’environnement. Les titulaires de droits étaient généralement insatisfaits de cette solution, puisque les produits étaient simplement détournés vers d’autres marchés et risquaient même d’être renvoyés à nouveau vers Dubaï.
La politique de « réexportation » était guidée par des soucis environnementaux. Le volume de produits suspects retenus était si grand que les autorités municipales refusaient de les éliminer dans les décharges communales car ils auraient posé un risque pour l’environnement et la santé publique.
En 2015, la division des DPI de la Douane de Dubaï s’est alliée aux titulaires de droits et à leurs représentants légaux ainsi qu’aux attachés commerciaux et à d’autres parties prenantes pour trouver une solution de rechange. Plusieurs discussions et ateliers ont été menés et il a finalement été décidé que les titulaires de droits engageraient des sociétés de recyclage basées aux Émirats arabes unis (EAU) pour éliminer les produits portant atteinte aux DPI. Ces mêmes titulaires supporteraient aussi les frais de recyclage et toutes les charges liées à l’opération. La Douane de Dubaï superviserait le processus de recyclage mené par les sociétés. Après plusieurs études et analyses d’impact minutieuses, la nouvelle politique d’élimination des produits de contrefaçon à travers le recyclage a été adoptée et est entrée pleinement en vigueur en avril 2018.
En 2021, la Douane de Dubaï a effectué quelque 390 saisies, pour un total de 1 764 710 articles de contrefaçon – un bond considérable par rapport aux 1 906 articles saisis en 2020. Parmi les faux produits, on retrouve tout aussi bien des ordinateurs que des chaussures de sport, des montres, des accessoires de téléphone portable, des écouteurs, des vêtements, des sacs et des produits cosmétiques. Tous les articles saisis ont été envoyés au recyclage.
La Douane de Dubaï peut être amenée à détenir des produits suspectés de porter atteinte aux DPI selon deux cas de figure (voir graphique n° 1) :
la Douane de Dubaï découvre des articles suspects, enfreignant potentiellement les DPI, et en notifie le titulaire de droits concerné ;
le titulaire de droits découvre un envoi suspect et en informe la Douane de Dubaï.
Si l’importateur ne reconnaît pas que les produits suspects sont contrefaisants, la Douane de Dubaï prélève un exemplaire de l’article dans une cargaison ou à l’endroit où ils ont été découverts (usine, dépôt, etc.) et le transmet à un laboratoire officiel à des fins de tests pour déterminer si l’article est authentique ou pas. Dans ce but, le titulaire de droits est tenu de fournir à la Douane de Dubaï un exemplaire d’un produit authentique correspondant à l’article suspect. Si le laboratoire confirme que l’article analysé n’est pas authentique, la Douane saisit les articles. Si le titulaire de droits ne peut fournir un exemplaire du produit authentique, il doit alors communiquer les spécifications techniques de la marchandise ainsi que toute autre information pertinente.
Affaires récentes
Une affaire récente impliquait un grand fabricant de tabac. Durant une inspection ad hoc menée par les douaniers dans la zone franche de Jebel Ali, un envoi contenant près de deux millions de cigarettes suspectées d’être de contrefaçon a été retrouvé dans l’entrepôt d’une société de logistique. Un examen criminalistique d’un échantillon a été mené et il a pu être déterminé que les produits étaient effectivement des contrefaçons. Le titulaire de droits a déposé plainte pour obtenir la confiscation et la destruction des produits contrefaisants et il a pris les dispositions nécessaires pour leur élimination par une société de recyclage. Après une enquête en bonne et due forme, la Douane de Dubaï a décidé que les produits devaient être saisis et remis à la société de recyclage.
Dans une autre affaire, 58 tuyaux servant au transport de pétrole et de gaz ont été saisis suivant une notification de la part d’une société de conseil en DPI, informant la Douane que des produits en violation d’une marque de fabrique avaient été chargés à bord de quatre conteneurs expédiés depuis un pays asiatique. Ces tuyaux auraient posé d’énormes risques pour la sécurité et l’environnement s’ils n’avaient pas été retirés du marché, dans la mesure où ils n’auraient pas résisté au niveau de pression requis pour le transport de pétrole et de gaz. Encore une fois, dans ce cas, les titulaires de droits ont pris les mesures nécessaires pour envoyer les produits en cause à un centre de recyclage.
Un nouvel élan
La nouvelle procédure devrait donner un nouvel élan à la coopération entre les titulaires de droits et la Douane de Dubaï. Cette dernière organise régulièrement des formations en coopération avec les titulaires de droits de grandes marques afin d’améliorer les capacités des inspecteurs à détecter les contrefaçons et à faire la distinction entre les produits faux portant atteinte aux DPI et les articles authentiques. Des indicateurs de risque sont constamment mis au point et revus pour permettre une évaluation des risques efficace par le système d’analyse automatisé de la Douane. Ce processus est complété par les visites physiques aux dépôts et aux usines, menées par des inspecteurs en douane hautement qualifiés.
Les autres autorités douanières des Émirats arabes unis appliquent également cette politique de recyclage. En 2021, le Bureau du représentant américain au commerce (USTR) a retiré les EAU de la liste de surveillance des États-Unis en matière de protection de la propriété intellectuelle (PPI). Dans le rapport accompagnant sa décision, le Bureau du représentant américain au commerce a reconnu que les EAU avaient fait d’énormes progrès pour supprimer les obstacles de longue date entravant la protection des DPI, en particulier grâce aux efforts réalisés par la Douane de Dubaï.