Gestion des restrictions à l’exportation des vaccins contre la COVID-19 : l’expérience de la Belgique
24 février 2022
Par Werner Rens, chef du service marketing, Douane belgeEn 2020, la Commission européenne a signé des contrats d’achat anticipé (CAA) avec les fabricants de vaccins contre la COVID-19 au nom des États membres de l’Union européenne (UE). Cette stratégie devait garantir à leurs populations un accès abordable et rapide à ces vaccins. Un soutien financier avait par ailleurs été accordé aux fabricants pour leur permettre d’intensifier leur production. Fin 2020, certains annonçaient qu’ils ne livreraient pas les quantités de vaccins qu’ils s’étaient engagés à fournir à l’Union, à l’encontre de leurs engagements contractuels.
En janvier 2021, la Commission décidait que les exportations de vaccins contre la COVID-19 couvertes par un CAA avec l’Union seraient soumises à l’autorisation des États membres. Il s’agissait d’assurer un accès rapide aux vaccins contre la COVID-19 à tous les citoyens de l’Union et d’apporter une plus grande transparence quant à la production de vaccins au sein de l’UE et à leur exportation. Le règlement d’exécution (UE) 2021/111 de la Commission subordonnant l’exportation de vaccins contre la COVID-19 à la production d’une autorisation d’exportation entrait en vigueur le 13 mars 2021.
La Commission a exclu de ce régime plusieurs types particuliers d’exportations afin qu’il n’ait pas d’incidence sur les engagements internationaux de l’Union. Citons par exemple les exportations qui s’effectuent dans le cadre d’une intervention humanitaire d’urgence ou les exportations de biens achetés ou livrés par l’intermédiaire de l’initiative COVID-19 Vaccines Global Access (COVAX), du Fonds des Nations Unies pour l’enfance et de l’Organisation panaméricaine de la santé à destination de tout autre pays participant au mécanisme COVAX[1]. La Commission a également tenu compte des CAA conclus avec des pays tiers, et des attentes de ces pays quant à l’exécution de leurs livraisons. Qui plus est : « Le présent règlement devrait s’appliquer aux exportations de marchandises de l’Union depuis le territoire douanier de l’Union. Par conséquent, les pays qui font partie dudit territoire douanier[2] n’ont pas besoin d’être exemptés pour pouvoir recevoir des transferts sans restrictions depuis l’Union. »
L’autorisation d’exportation devait être délivrée par l’autorité compétente de l’État membre où les vaccins avaient été fabriqués. Elle devait être produite au moment où les marchandises étaient déclarées à l’exportation ou, au plus tard, au moment de leur mainlevée. En Belgique, l’autorité compétente pour l’octroi de l’autorisation était le ministère de l’économie, et l’autorité de contrôle, la Douane.
Le règlement établissait la procédure suivante : le fabricant devait envoyer une demande accompagnée des données d’expédition correspondantes à l’autorité compétente par écrit ou par voie électronique. Une autorisation était nécessaire pour chaque expédition. L’autorité compétente devait traiter la demande dès qu’elle la recevait et rendre une décision au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant la réception de toutes les informations requises. Le numéro d’identification de l’autorisation devait être mentionné dans la déclaration d’exportation correspondante, qui devait être vérifiée par la douane avant la mainlevée des marchandises.
La Belgique accueille de nombreux centres de recherche et de développement pharmaceutiques et plusieurs grands sites de production, dont l’un des deux sites de production de vaccins contre la COVID-19 de Pfizer-BioNtech (l’autre site est situé au Michigan, États-Unis). De nombreuses entreprises de logistique spécialisées dans la manipulation de produits pharmaceutiques sont également implantées à proximité des aéroports de Bruxelles et de Liège.
Le pays a donc été directement touché par le règlement et a participé à sa mise en œuvre. Le défi était de permettre à Pfizer de continuer à exporter son vaccin le plus rapidement possible, tout en mettant en œuvre le nouveau règlement. Pour ce faire, une communication directe a été instaurée entre les trois parties prenantes : le fabricant (Pfizer), l’autorité compétente pour l’octroi des autorisations (le ministère de l’économie) et l’autorité chargée de superviser les exportations (la Douane). Le chef du département douane de Pfizer, le chef du département des autorisations du ministère de l’économie et le chef du département marketing et service à la clientèle de la Douane ont notamment échangé numéros de téléphone et courriels.
Il était également important de veiller à ce que le processus de demande des autorisations d’exportation soit efficace, et un mécanisme de partage des données préalables sur les expéditions nécessitant une autorisation a donc été mis en place. Au début de chaque semaine, les employés de Pfizer chargés de la planification des expéditions fournissaient au ministère de l’économie et à la Douane les données relatives à tous les envois qui devaient être expédiés cette semaine-là. Le ministère de l’économie communiquait ensuite sa décision à Pfizer et à la Douane, notamment directement aux agents en charge de la vérification des expéditions. Cette procédure a permis de réduire les risques de retards.
Le département informatique de l’Administration douanière a également mis au point un tableau de bord électronique permettant aux agents des douanes de visualiser en temps réel les données relatives aux exportations de vaccins contre la COVID-19. Cela a grandement facilité la surveillance et le contrôle des expéditions.
Au cours de la période de validité du règlement, soit du 13 mars 2021 au 30 juin 2021, et à la date de rédaction de cet article (février 2022), il n’y a pas eu de perturbations significatives des exportations de vaccins Pfizer contre la COVID-19 au départ de la Belgique.
En savoir +
CORONA – Informations et mesures | SPF Finances (belgium.be)
[1] Voir EUR-Lex – 32021R0111 – FR – EUR-Lex (europa.eu)
[2] Le territoire douanier de l’Union est défini à l’article 4 du code des douanes de l’Union. Voir https://ec.europa.eu/taxation_customs/territorial-status-eu-countries-and-certain-territories_fr