Panorama

De meilleurs résultats dans la lutte contre le trafic de cigarettes: l’expérience positive de la Douane dominicaine

14 octobre 2017
Par la Direction de la Douane de la République dominicaine

Les trafics illicites menacent l’ossature du commerce et de l’industrie et requièrent une vigilance constante de la part des administrations des douanes qui, présentes aux frontières, jouent un rôle crucial dans la lutte contre ces phénomènes, protégeant ainsi les recettes publiques et les revenus des entreprises.

Il existe plusieurs types d’activités commerciales illicites : blanchiment d’argent, trafic de drogue, contrebande de pierres et de métaux précieux, commerce de produits piratés et contrefaisants, trafic d’êtres humains et d’espèces sauvages protégées, etc. Le graphique ci-dessous, publié par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), présente une estimation des recettes générées selon le secteur d’activités. La valeur du trafic de tabac, calculée en pertes de recettes, s’élèverait à environ 40 milliards de dollars des États-Unis.

 

Le commerce illicite du tabac sévit dans toutes les régions du monde, quel que soit le niveau de revenus du pays. Il englobe des pratiques liées à la distribution, à la vente et à l’achat de produits de tabac interdites par la loi, telles que l’évasion fiscale (vente de produits de tabac sans paiement des taxes en vigueur), la falsification et la dissimulation de l’origine des produits, et la contrebande.

La vente de cigarettes représente près de 90% du marché mondial du tabac. Si le nombre de cigarettes vendues a chuté ces dernières années, leur valeur marchande, en revanche, a augmenté (IMARC, « Cigarette Market : Global Industry Trends, Share, Size, Growth, Opportunity and Forecast 2017-2022 »).

Comme l’indique le « Rapport Douanes et Tabac 2010 » de l’OMD, « les réseaux de trafiquants transnationaux tirent parti de tous les points faibles que peuvent présenter les contrôles douaniers, fiscaux ou autres aux frontières pour amasser des profits. » Les trafics non seulement affectent les recettes des États, mais sont également des sources de revenus pour des organisations criminelles et terroristes, comme le précise encore l’OMD dans l’édition 2014 de son « Rapport sur les trafics illicites ».

Menées dans la discrétion et la clandestinité, les importations illicites de tabac sont difficiles à mesurer. L’Organisation mondiale de la santé estime qu’une cigarette consommée sur 10 provient de trafics illicites [www.who.int/fctc/mediacentre/news/2015/wtnd2015/fr/].

Selon une étude d’Euromonitor International, le marché du tabac illicite aurait évolué de la manière suivante sur la période 2009-2014 : le marché latino-américain aurait connu une croissance de 12 % environ ; le Moyen-Orient et l’Afrique auraient enregistré la plus forte croissance en termes de volume de cigarettes illicites vendues ; l’Amérique du Nord, la République populaire de Chine et l’Asie-Pacifique seraient des marchés en baisse.

 

Le graphique 3 met en relation la production mondiale de cigarettes enregistrée en 2015 par les quatre grands fabricants de tabac et le volume du commerce illicite, qui se retrouve en troisième position.

L’expérience de la Douane dominicaine

La Douane de la République dominicaine est consciente que, dans un petit pays comme le sien, toute irrégularité mettant à mal les règles du marché peut conduire rapidement une entreprise à la faillite, avec des effets négatifs sur l’emploi, la protection sociale et les recettes publiques. Elle procède de la même manière pour tout type de commerce illicite transfrontalier : les inspections sont réalisées en fonction des risques que présentent les transactions et de leurs conséquences éventuelles sur l’environnement, la santé et la concurrence. Aucune affaire, ainsi identifiée, n’est minimisée ou négligée.

Le nombre de cas de contrebande de cigarettes, enregistrés ces dernières années, illustre l’ampleur et la croissance de cette activité. Pour y faire face, la Douane a demandé l’assistance de représentants de fabricants locaux de tabac, ce qui lui a permis de mieux connaître le marché illicite du tabac dans le pays. L’enquête sur les emballages vides (Empty Pack Survey) menée par Phillip Morris Dominicana montre l’évolution de la consommation de cigarettes illégales sur le territoire dominicain de 2013 à 2016 (graphique 4).

Ces résultats ne donnent qu’une image succincte du phénomène, limitée à un moment donné dans l’année, néanmoins ils témoignent d’une hausse constante du nombre de paquets de cigarettes vendus au marché noir au fil du temps.

La Douane a pris des mesures spécifiques pour tenter de remédier à la situation. Entre 2012 et 2016, environ 90 millions de cigarettes avaient été saisies. Après avoir intensifié ses efforts, ce sont 123,9 millions de cigarettes au total qui ont été saisies et détruites entre août 2016 et août 2017 seulement.

Les chiffres relatifs à la consommation de tabac et aux recettes témoignent des efforts déployés l’année dernière par la Douane et permettent de reconsidérer totalement le niveau de la consommation de cigarettes dans le pays et des recettes collectées. En 2016, la Douane avait vu les importations de tabac et les recettes des ventes de tabac diminuer par rapport à 2015. Pendant les six premiers mois de 2017, par rapport à 2016, une hausse des recettes et de la consommation a été observée (voir graphique 6).

Le succès obtenu par la Douane dominicaine dans sa lutte contre le commerce illicite de cigarettes est dû, principalement, à plusieurs stratégies mises en œuvre depuis 2014 : signature d’un accord de coopération avec le Service de l’immigration et de la lutte contre la fraude douanière des États-Unis (ICE), échange de renseignements avec les fabricants de tabac, utilisation d’un système de suivi et de repérage, et, enfin, opérations coordonnées avec les autorités présentes aux frontières et les services de répression à des points stratégiques de l’île.

Coopération avec d’autres services gouvernementaux

L’accord de coopération avec l’ICE a permis à la Douane dominicaine de renforcer son unité dédiée à la transparence commerciale. En analysant les détails des transactions commerciales au moyen du système américain d’analyse de données et de recherche pour la transparence commerciale (DARTTS), l’unité est désormais mieux à même de détecter les anomalies et les activités commerciales suspectes. Le système permet, en effet, de réaliser des analyses complexes. Il renferme des données commerciales provenant à la fois des États-Unis et d’autres pays et permet d’identifier les transactions qui s’écartent des schémas commerciaux dits « normaux ».

La Douane dominicaine a également resserré ses liens avec des institutions publiques nationales, notamment avec le Bureau du Procureur général (compétent en cas de poursuites pénales des auteurs des délits) et avec le Directeur général de l’Administration fiscale nationale (car ces délits ont des répercussions sur le recouvrement des taxes appliquées aux cigarettes). Les fonctionnaires de la Douane procèdent notamment à des inspections dans les ports, dans les aéroports et aux frontières, avec leurs homologues de la police nationale et des institutions précitées. Ces opérations ont permis de détecter de vastes quantités de produits de contrebande.

Partenariats public-privé
Le secteur privé joue un rôle essentiel pour la prévention de la contrebande et pour une lutte efficace contre le commerce illicite en informant les douaniers d’activités ou de comportements suspects. Un protocole d’accord a d’ailleurs été signé entre la Douane dominicaine et Phillip Morris International afin d’officialiser leur coopération en matière de lutte contre la contrebande de cigarettes.

Reconnaissant les efforts de la Douane, Alvise Giustiniani, vice-président chargé de la stratégie et de la prévention contre le commerce illicite chez Phillip Morris International, a déclaré : « le commerce illicite nuit à l’économie et à la société. Il constitue une réelle menace pour la sécurité nationale, et aucun groupe, aucun gouvernement ni aucune entreprise ne parviendra à l’éradiquer en agissant seul. Le protocole d’accord que Philip Morris International a signé avec la Douane dominicaine est un exemple de collaboration efficace entre gouvernement et secteur privé pour amplifier l’impact de leurs actions. Nous saluons le rôle de chef de file joué par la Douane et son attachement à lutter contre le commerce illicite de tabac, qui lui a déjà permis d’enregistrer des résultats majeurs. »

Cette stratégie a été adoptée également par la Douane panaméenne dont les efforts ont été reconnus par le secteur privé. Selon Alfredo Argueta, responsable de British American Tobacco au Panama, l’Administration panaméenne « suit fidèlement l’exemple de la Douane dominicaine en appliquant des mesures équivalant à celles engagées avec succès par cette dernière pour réduire le commerce de cigarettes qui, illégalement, entrent sur le territoire panaméen ou en sortent. »

Suivi

Grâce à l’apposition obligatoire de timbres sur chaque paquet de cigarettes qui permet un suivi et repérage de leur statut fiscal et en analysant les caractéristiques des conteneurs (poids, quantité, importateur, etc.), les douaniers chargés du renseignement sont mieux à même de trouver les cigarettes illégales souvent dissimulées, que ce soit dans des conteneurs remplis de matériaux de construction, de rouleaux de tissus, de confiseries ou de boissons énergisantes.

Les cigarettes entrant illégalement dans le pays sont rarement des cigarettes de marques reconnues. La plupart appartiennent à la catégorie des cigarettes appelées « illicit whites » ou « cheap whites » : cigarettes fabriquées légalement par des fabricants indépendants implantés dans différentes régions du monde, pour lesquelles il n’existe pas de réel marché légal, ou qui sont destinées uniquement ou principalement au marché illégal d’un autre pays, ou bien qui sont envoyées illégalement dans un pays et vendues dans ce pays.

Ce commerce illicite change rapidement de forme. Ceux qui le pratiquent savent adapter leurs techniques, par exemple en déclarant des marchandises à faibles risques pour bénéficier d’avantages en termes de facilitation des échanges. La Douane dominicaine est bien consciente de ces phénomènes et actualise en permanence ses critères de risque. En outre, avant 2014, les cigarettes saisies étaient vendues aux enchères publiques. En 2016, la DGA a commencé à les incinérer pour protéger la population et assurer une concurrence saine aux opérateurs commerciaux et distributeurs licites et officiels présents sur le marché.

Conclusion

La Douane dominicaine est consciente que, s’il n’est pas facile d’éliminer la contrebande ni l’évasion fiscale, adopter une démarche globale, impliquant l’ensemble des services gouvernementaux, peut toutefois permettre d’en réduire l’ampleur. Cela exige, bien entendu, une forte volonté politique et de disposer de ressources humaines qualifiées. Les fonctionnaires des douanes doivent être capables d’utiliser des moyens technologiques et de nombreuses sources de données pour détecter plus efficacement les schémas commerciaux illicites et, ainsi, mieux lutter contre la fraude transfrontalière, mieux protéger les recettes publiques, et mieux préserver la santé de la population.

En savoir +
s.carbonell@dga.gov.do
www.aduanas.gob.do