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Panorama

L’UE lance un nouveau Modèle de données douanières basé sur les normes de l’OMD

29 octobre 2015
Par Frank Janssens, Chef d'unité and Jean-Luc Delcourt, Chef de secteur, Processus douaniers et gestion de projet, Direction générale de la fiscalité et de l'union douanière

Entre 2016 et 2020, de nombreux nouveaux systèmes douaniers électroniques verront le jour au sein de l’Union européenne (UE). Ces nouveaux systèmes se baseront sur de nouvelles exigences en matière de données fondées sur un nouveau modèle de données compatible avec celui de l’OMD et dénommé Modèle de données douanières de l’UE (ci-après, MDD UE). Le MDD UE permettra d’harmoniser davantage les exigences en matière de données électroniques au sein de l’UE et de construire une structure interopérable à trois niveaux, du niveau mondial au national, en passant par le régional. Parmi les résultats escomptés figurent une intégration régionale accrue, une meilleure interconnexion entre la douane et les autres administrations présentes aux frontières ainsi qu’entre la douane et les opérateurs économiques.

En 2018, l’UE fêtera le 50e anniversaire de son Union douanière. Au cours de son demi-siècle d’existence, cette union s’est non seulement élargie géographiquement mais elle a également harmonisé et intégré graduellement ses procédures.

La prochaine étape importante consistera à mettre en œuvre le code des douanes de l’Union (CDU), adopté le 9 octobre 2013 en tant que Règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, qui prévoit des procédures communes supplémentaires sur tout le territoire de l’UE et se fonde sur plusieurs nouveaux systèmes douaniers électroniques comportant de nouvelles exigences en matière de données.

L’initiative permet de répondre au besoin de la douane d’adapter ses méthodes de travail à l’environnement commercial actuel et de saisir l’occasion pour améliorer l’efficacité des échanges de données ainsi que la qualité des informations fournies par les opérateurs économiques.

Il est en effet essentiel d’optimiser l’échange de données pour un fonctionnement efficace des projets liés à la facilitation des échanges, projets qui exigent une coopération fluide entre les instances publiques impliquées et qui consisteront notamment à mettre en place un environnement de guichet unique ainsi que de nouveaux outils permettant de garantir la sécurité de la chaîne logistique.

Une démarche sur trois niveaux

Pour relever ces défis, il est fondamental d’adopter une méthodologie structurée et bien documentée qui permette d’aboutir à une normalisation là où cela est nécessaire, mais qui laisse aussi suffisamment de liberté dans la gestion des échanges d’informations là où le contexte régional et national l’exige.

Premier niveau et pierre angulaire de toute évolution future, le Modèle des données de l’OMD (MD OMD) apporte le cadre global requis et permet l’harmonisation nécessaire pour rendre tout travail de collaboration possible avec les autres services publics présents aux frontières.

La démarche du Modèle de données présente non seulement des avantages généraux indéniables en matière de facilitation des échanges, mais il offre également la possibilité d’approfondir encore davantage l’intégration régionale. Si un groupe de pays désire tirer parti des avantages économiques et politiques de l’intégration régionale, les États concernés doivent assortir leurs efforts de toute une série de textes de loi spécifiques et de pratiques administratives communes, parmi lesquelles des exigences et des structures de données préalablement convenues.

La démarche intégrée de l’UE, en tout cas pour ce qui a trait à la gestion des données au titre des douanes, trouve à présent son expression concrète dans le MDD UE, qui constitue un deuxième niveau de développement, censé être entièrement compatible avec le premier, c’est-à-dire avec le Modèle de données de l’OMD.

Si l’Union douanière a atteint un niveau remarquable d’intégration, certaines formalités douanières et frontalières relèvent encore et toujours du domaine national. Le MDD UE, élaboré sur la base du MD OMD, permet d’établir des modèles de données douanières nationaux, qui constituent dès lors le troisième niveau de parachèvement et de détail, en toute compatibilité avec les deux autres niveaux. Ce troisième niveau est particulièrement utile là où des systèmes douaniers nationaux automatisés sont mis sur pied, ces derniers devant rester compatibles avec les autres instruments de l’UE.

Le MDD UE

D’un point de vue formel, les informations recueillies par la douane sont publiées dans le Journal officiel de l’UE en tant qu’annexes aux actes d’exécution et aux actes délégués du CDU, actuellement en cours d’adoption. Ces textes établissent la base légale des exigences en matière de données qui doivent être fournies par les opérateurs économiques et permettent aussi à toutes les parties concernées d’avoir accès aux dispositions juridiques qui constituent la base du MDD de l’UE, et ce dans toutes les langues officielles de l’UE.

D’un point de vue pratique, la Commission européenne a décidé d’utiliser un outil spécifique pour développer et garder à jour le MDD UE, outil déjà choisi par l’OMD pour assurer la diffusion de son propre Modèle de données. Cet outil offre plusieurs avantages pratiques : il constitue non seulement une source d’informations sur les normes internationales utilisées mais il offre aussi un environnement où les exigences en matière de données sont gérées

L’outil vient préalablement installé avec le Modèle de données de l’OMD et d’autres normes internationales convenues. En tant que tel, il s’est révélé être un environnement idéal pour commencer à cartographier les exigences de l’UE en matière de données par rapport à celles du MD OMD. Au cours de l’exercice, les parties prenantes se sont rendu compte que certaines exigences de l’UE n’étaient pas disponibles dans le Modèle de l’OMD ou qu’elles devaient être adaptées. En conséquence, les données régionales de l’UE sont en train d’être ajoutées au MD OMD afin de refléter le contenu du MDD UE.

L’outil permet de générer de façon automatique des annexes de données aux actes d’exécution et aux actes délégués du CDU pour publication dans le Journal officiel de l’UE. Cette fonctionnalité permet d’offrir une source d’information unique sur les instruments juridiques et techniques, éliminant ainsi les risques d’erreur dans la traduction des dispositions légales en format technique utilisable dans le monde de la modélisation.

A cet égard, outre l’autogénération de documents et de structures pour la publication, l’outil peut également créer des schémas XML (instruments destinés aux créateurs de logiciels, utilisés pour exprimer la structure et les contraintes d’un document XML) suivant les règles de conception du schéma XML de l’OMD ou, le cas échéant, suivant d’autres formats appropriés.

Le Modèle de données de l’OMD inclut les dossiers d’information, qui sont des modèles de référence pour l’échange de renseignements. Dans ce cadre, un dossier d’informations douanières de l’UE, qui reprend les exigences de tous les Etats membres, est en cours d’élaboration.

Les Etats membres peuvent le réutiliser afin de couvrir les besoins nationaux au-delà du MDD UE. Ces besoins peuvent être administratifs, techniques ou liés à d’autres sources de données, comme par exemple, celles requises par les autorités du transport ou par les services vétérinaires. A l’instar de ce qui se fait au niveau de l’UE, les États membres peuvent également créer leur schéma XML élargi, sachant que s’ils suivent le même schéma, les deux niveaux seront interopérables.

Pour ce qui a trait à la divulgation d’informations, cette méthodologie permet de rendre les informations concernant le MDD UE accessibles aux administrations de tous les États membres et à leurs équipes en charge des technologies de l’information afin de leur faciliter la tâche en matière de conception et de mise à jour de leur système.

Elle permet également à d’autres utilisateurs, comme d’autres administrations ou encore des opérateurs économiques, d’hériter du MDD UE et de le personnaliser selon leurs exigences spécifiques, dans la limite de ce que permet le droit européen. La publication peut se faire dans le format natif de l’outil ou dans d’autres formats qui sont plus largement disponibles.

Différentes « perspectives »

Au cours de l’élaboration du MDD UE, la Commission a constaté que toutes les procédures liées au CDU ne pouvaient pas être cartographiées sur le MD de l’OMD selon les mêmes principes. Cela est dû au fait que les données soumises par certains opérateurs économiques proviennent du monde du transport et d’autres, de l’environnement de l’import/export.

Leur manière respective de percevoir l’information est si différente qu’elle ne peut être pleinement reflétée dans une structure cartographique unique et donc il est nécessaire d’envisager les démarches sous deux perspectives différentes, une qui corresponde au transporteur et l’autre à l’expéditeur, toutes deux devant rester indifféremment acceptables dans le cadre du modèle de données global.

Le MDD de l’UE attache une importance toute particulière au fait de garantir la prise en compte de ces « perspectives » dans le MD OMD afin de refléter les pratiques commerciales et de permettre ainsi une cartographie adéquate de toutes les données soumises à la douane. Pour l’exprimer plus simplement, on pourrait dire que :

  • la perspective ‘transport’ du MDD UE comprend les informations traditionnellement contenues dans une déclaration en douane, comme les déclarations à l’importation, à l’exportation et en transit, tant en format standard qu’en format simplifié ;
  • la perspective ‘envoi’ du MDD UE est davantage orientée vers les informations ayant trait à la sécurité et la sûreté, comme par exemple la déclaration sommaire d’entrée et les notifications d’arrivée et de présentation.

Si les perspectives sont différentes, elles sont toutefois structurées d’une façon très similaire avec une structure en arborescence et une indication claires de chaque élément de donnée et de la place spécifique qu’il occupe au sein de la structure globale du modèle de données.

Utiliser le MDD UE

Le MDD de l’UE n’est pas seulement disponible pour les administrations douanières des États membres en tant que source d’informations et instrument pour gérer les données dans le cadre des procédures douanières et des systèmes informatisés ; il offre également un certain nombre de possibilités supplémentaires au niveau national :

  • Il est possible de le réutiliser et de personnaliser le MD de l’OMD et le Dossier d’information du MDD UE au niveau national.
  • Il fournit une base pour couvrir les exigences nationales des États membres de l’UE en élargissant le dossier d’informations MDD UE, lui-même fondé sur le Modèle de données de l’OMD, dont la portée est plus large et qui est enrichi des demandes de modification de données discutées au sein des deux instances pertinentes de l’OMD que sont l’Équipe de projet chargée du Modèle de données (EPMD) et le Sous-Comité informatique (SCI).

D’un point de vue technique, le MDD UE et l’outil utilisé pour sa gestion permettront :

  • d’auto-générer des publications sur la structure nationale des documents tant pour les documents individuels que pour leurs sur-ensembles ;
  • d’auto-générer les schémas XML utilisés au niveau national, c’est-à-dire que les interfaces d’échange de tous les États membres qui suivent la même structure XML seront techniquement interopérables.

Tant la publication de la structure de document nationale que les schémas XML constituent des documents techniques qui se basent sur les exigences légales et les traduisent en format lisible pour les informaticiens, permettant aux développeurs de logiciels de mener à bien leur travail. Ce travail comprend notamment la mise au point de structures de message, de règles et de conditions ainsi que des spécifications qui s’appliquent à la structure de document nationale et aux schémas XML.

Outre les textes juridiques qui seront publiés dans le Journal officiel de l’UE, les États membres de l’UE et les opérateurs économiques auront également la possibilité d’accéder au MDD UE en format modifiable, comme par exemple en pdf, MS Excel et/ou MS Word, ainsi qu’en format de lecture seule directement dérivé de l’outil dans un environnement de ‘publication’ séparé. Pour ceux qui préfèrent choisir l’outil utilisé par l’OMD, la Commission européenne a l’intention de donner accès au MDD UE dans son format modifiable d’origine tel que présent dans l’outil. Toute modification devra être apportée par l’utilisateur à travers l’outil de son choix.

Gestion coordonnée des frontières

Le MDD UE constitue une base et un outil excellents pour intégrer les besoins et les exigences d’autres administrations présentes aux frontières. Il convient par ailleurs de s’attarder sur le déploiement d’un environnement de guichet unique au sein de l’UE. Le Conseil de l’Union, dans ses conclusions à ce sujet, a recommandé d’accélérer l’harmonisation des données exigées par les différentes autorités au niveau européen et national, sur la base des normes internationales existantes et dans la lignée des efforts de numérisation. Il s’agira de :

  • réutiliser et personnaliser le MD OMD dans la lignée des besoins des administrations associées présentes aux frontières, et ce afin d’établir un environnement de guichet unique douanier fonctionnel.
  • déployer des systèmes adaptés au niveau national en combinaison avec les personnalisations mentionnées ci-dessus, tout en garantissant la compatibilité avec le MD OMD et le MDD UE, l’objectif étant de permettre aux administrations d’adapter le MDD UE à leurs propres spécificités nationales qui ne sont pas prévues dans le droit européen et, par conséquent, ne figurent pas dans le MDD UE. Un exemple évident sont les idiosyncrasies nationales au niveau fiscal et notamment des accises, qui peuvent différer d’un État membre à l’autre.
  • inclure les exigences des autres services présents aux frontières à travers la soumission de demandes de modification de données à l’EPMD et au SCI de l’OMD.

Parallèlement, il est envisagé d’explorer d’autres opportunités de coopération avec les opérateurs économiques concernant l’utilisation du MDD UE pour des projets de rationalisation et d’automatisation qui devraient encore faciliter et harmoniser l’échange d’informations entre les douanes et les opérateurs économiques.

Parmi de tels projets figurent l’outil d’exploitation des données pour le système « Surveillance 2+ » qui assure la collecte des données dans le cadre de la supervision des opérations d’importation et d’exportation, le système des Renseignements tarifaires contraignants (RTC) qui inclut une base de données de toutes les demandes de RTC, ou encore le Système central / Données de référence (système CS-RD2) qui constitue le fondement de l’utilisation des codes communs dans l’environnement plurilingue de l’UE.

De cette façon, la douane améliorera considérablement son rôle tant en matière de facilitation que de contrôle des échanges. Par ailleurs, l’amélioration de l’interopérabilité – grâce à une meilleure intégration des données tout au long de la chaîne logistique – et de la qualité des données qui découlera du MDD UE rendra la gestion des risques plus efficace.

 

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