Panorama

La coopération : clé de voûte de l’Union douanière européenne

27 juin 2016
Par Roel van 't Veld, Conseiller spécialisé, Affaires de l’UE, Administration des douanes des Pays-Bas

Pour qu’une union douanière fonctionne correctement, il faut que les administrations des douanes des pays de cette union coopèrent activement entre elles. Cette coopération ne se limite pas forcément aux aspects juridiques des compétences douanières « de base » que sont, par exemple, le contrôle des formalités d’importation et d’exportation ou la mise en place d’un tarif commun. Une union douanière doit permettre également aux autorités douanières de coopérer sur des questions liées à la lutte contre la fraude et la criminalité afin d’avoir une action efficace dans ces domaines et d’assurer la sécurité en son sein.

À propos de l’Union européenne

L’Union européenne (UE) est une union politico-économique, composée aujourd’hui de 28 États membres. L’union douanière est entrée en vigueur le 1er juillet 1968, date de la suppression des derniers droits de douane sur le commerce intracommunautaire et de l’introduction du tarif douanier commun en lieu et place des droits de douane nationaux pour le commerce avec le reste du monde. Les contrôles douaniers aux frontières intérieures de l’UE ont été supprimés en 1993, reléguant les longues files de véhicules aux postes-frontières à l’histoire ancienne.

La politique douanière relève de la responsabilité de l’UE. C’est l’un des domaines de compétence exclusive de l’Union. L’application de l’Union douanière repose toutefois sur l’existence de partenariats étroits avec les États membres et entre ces États.

Le Conseil de l’UE, qui représente les gouvernements des États membres, décide des droits à appliquer et il est responsable, conjointement avec le Parlement européen, de la coopération douanière entre les États membres d’une part, et entre les États membres et la Commission européenne (CE) d’autre part.

La présidence du Conseil est assurée à tour de rôle par chaque État membre pour une période de six mois. Pendant cette période, l’État en question préside les réunions à tous les niveaux du Conseil. Les États membres assurant la présidence travaillent en étroite coopération par groupes de trois, appelés « trios ». Le trio fixe les objectifs à long terme et élabore un programme commun définissant les thèmes et les grandes questions qui seront traités par le Conseil au cours d’une période de 18 mois. À partir de ce programme, chacun des trois pays élabore son propre programme semestriel plus détaillé.

Groupe « Coopération douanière »

Au sein du Conseil, les travaux techniques sont confiés à de nombreux groupes de travail. Deux d’entre eux sont spécialisés dans les questions douanières :

  • le Groupe « Union douanière » (GUD), étroitement lié aux domaines du commerce et de la compétitivité, examine les questions relatives à la politique et à la législation douanières et prend les décisions correspondantes ;
  • le Groupe « Coopération douanière » (GCD) coordonne la coopération opérationnelle entre les administrations douanières nationales et s’efforce d’aligner les activités des services douaniers européens sur les priorités identifiées par la communauté des services répressifs dans son ensemble, tout en s’assurant que les connaissances précieuses des douanes sur le transport international de marchandises sont prises en compte et exploitées comme il se doit.

Outre les États membres, des représentants de la CE et d’autres entités de l’UE, comme l’Office européen de la lutte antifraude (OLAF) et l’Office européen de police (EUROPOL), participent aux discussions du GCD.

Présidence néerlandaise

Le trio présidant actuellement le Conseil regroupe les Pays-Bas, la Slovaquie et Malte. Les Pays-Bas ont assuré en premier la présidence du 1er janvier au 30 juin 2016 et ont dû, dès lors, planifier et présider, durant cette période, les réunions du Conseil et de ses instances préparatoires. Le GCD a été présidé par l’Administration des douanes des Pays-Bas, avec l’appui de quelques agents du Secrétariat du Conseil. Une équipe dédiée de six personnes [voir photo] a organisé au total 10 réunions, dont une réunion de haut niveau avec les Directeurs des douanes, organisée conjointement avec le GUD.

Initiatives relatives à la lutte contre le terrorisme et le crime organisé

La priorité de la présidence néerlandaise, s’agissant du GCD, était de renforcer les actions du groupe dans les domaines liant la douane, la justice et les affaires intérieures. Voici quelques exemples d’initiatives menées durant cette présidence sur l’implication de la douane dans la lutte contre le terrorisme et le crime organisé. 

Terrorisme

Après les attentats de Paris et de Bruxelles, la lutte contre le terrorisme a occupé une place de premier plan dans l’ordre du jour de la présidence néerlandaise. Les autorités douanières contribuent dans une large mesure à la protection de la société en empêchant les organisations terroristes de disposer des moyens de commettre leurs attentats : armes, explosifs ou financement.

La mission du GCD est, entre autres, d’approuver les projets relatifs à la mise sur pied d’opérations douanières conjointes. Pendant la présidence néerlandaise, une opération rassemblant les services des douanes et les forces de police des pays de l’UE a été engagée contre la contrebande d’armes à feu. L’opération en est à son stade final. En amont de l’opération, des experts de l’OMD avaient fourni aux participants des informations précieuses sur la dimension internationale des trafics.

Le financement du terrorisme a fait l’objet également de discussions au sein du GCD, et plus particulièrement les sources de financement que sont le trafic de biens culturels et d’espèces sauvages. Des experts ont notamment fait part des bonnes pratiques de leurs administrations dans la lutte contre la criminalité à l’égard des espèces sauvages.

Le GCD a également initié les travaux visant à mettre en place une coopération et une coordination efficaces entre les douanes et le nouveau Corps européen de gardes-frontières et de gardes-côtes. Il établira en temps utile une stratégie sur la gestion coordonnée des frontières et engagera des discussions au cours desquelles l’OMD sera consultée. 

Crime organisé

La lutte contre le crime organisé exige une coopération étroite entre services répressifs, au niveau politique et au niveau pratique. La plateforme pluridisciplinaire européenne contre les menaces criminelles (EMPACT) a été créée pour mettre en application les priorités de l’UE sur la lutte contre le crime organisé et le crime international grave dans les enquêtes et opérations. Ces priorités correspondent aux domaines nécessitant une activité concertée des services répressifs européens identifiés dans les conclusions de « l’évaluation de la menace que représente la grande criminalité organisée (SOCTA) », réalisée par EUROPOL.

La présidence néerlandaise a œuvré afin que les autorités douanières soient mieux impliquées dans le processus décisionnel des hauts représentants de la justice, ce qui a eu pour effet une participation plus poussée des douanes dans le développement des activités conjointes de lutte contre le crime organisé s’inscrivant dans le mandat de la plateforme EMPACT.

Fraude aux droits d’accise

La lutte contre la fraude aux droits d’accise demeure un problème majeur pour l’UE. Ce type de fraude menace les intérêts financiers de l’UE et est, en outre, souvent lié au crime organisé. Le GCD a consacré une bonne partie de son temps à examiner les moyens de mettre fin à ce type de fraude. L’OLAF a notamment présenté les principales mesures engagées et toujours en cours pour lutter contre la contrebande de cigarettes et d’autres formes de commerce illicite de produits du tabac. L’OMD a présenté également ses activités dans ce domaine.

Échange d’informations

Pour que leur coopération soit efficace, il est important que les entités des États membres de l’UE chargées de veiller au respect de la loi puissent s’échanger des informations. L’un des axes de travail de la présidence néerlandaise portait sur l’amélioration de l’échange de données entre les autorités douanières et fiscales, à la fois au niveau national et au niveau de l’UE.

Lors d’une réunion rassemblant les directeurs généraux des douanes, il a été question de la fraude fiscale transfrontalière et de la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Il a été décidé de créer deux groupes réunissant experts douaniers et fiscaux : le premier se penchera sur la lutte contre la fraude à la TVA lorsque des marchandises sont importées dans un État membres alors que la TVA est due dans un autre ; le second examinera la fraude à la TVA liée aux opérations de commerce électronique, en particulier aux retours de marchandises.

Voie à suivre

Durant la présidence néerlandaise, le GCD s’est réuni 10 fois au total, abordant de nombreux sujets autres que ceux présentés dans cet article, tels que le développement d’un catalogue de formations sur la lutte contre la fraude douanière, la création d’une feuille de route pour améliorer l’échange d’informations (y compris des solutions d’interopérabilité) ou encore des questions de gouvernance du GCD en lui-même. Finalement, ce n’est pas la présidence qui fait la réussite du GCD – cette dernière ne joue qu’un rôle de facilitateur -, c’est bien plus l’implication des États membres.

Pendant les six mois de la présidence néerlandaise, plusieurs groupes de projet, comprenant des représentants de différents États membres, ont commencé à s’attaquer aux risques dans le domaine de l’accise, de la contrebande d’argent en espèces, des armes à feu et des colis de petite taille. Le 1er juillet 2016, la Slovaquie a pris la présidence avec un ordre du jour ambitieux afin de poursuivre les travaux engagés sous la présidence néerlandaise, ordre du jour défini d’un commun accord avec les autres membres du trio. Durant la présidence slovaque et ensuite la présidence maltaise, la mission prioritaire du GCD sera une fois de plus d’améliorer la coopération entre autorités douanières et autres organismes veillant au respect de la loi pour lutter contre le terrorisme transfrontalier.

 

En savoir +
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