Des contrôles douaniers intelligents et intégrés pour faciliter et protéger les voyages internationaux
21 octobre 2020
Par le Professeur Zhiqiang CHEN, Président et PDG de NUCTECHLes statistiques montrent que les trafiquants cherchent de plus en plus à exploiter les vulnérabilités du transport aérien pour transporter des produits dangereux, interdits ou faisant l’objet de restrictions. Le Rapport sur les trafics illicites 2019 de l’OMD révèle que « 126 pays ont soumis 45.497 cas de trafic de drogue à l’OMD en 2018 ; les principaux moyens de transport étaient le courrier (en deuxième position) et la voie aérienne (en troisième position) ».
La pandémie de COVID-19 exige une distanciation sociale et les inspections physiques par les fonctionnaires des douanes sont dès lors non seulement peu souhaitables, mais aussi pour certains inacceptables étant donné le risque d’infection qu’elles font peser sur les voyageurs et les fonctionnaires. Dans ce contexte, la douane devrait, plus que jamais, avoir recours aux équipements d’inspection non-intrusifs et à la détection automatique.
Un domaine pour lequel il est nécessaire de renforcer les processus est le contrôle des bagages à l’arrivée. En effet, dans de nombreux pays, les bagages ne sont pas automatiquement scannés à l’arrivée.
Certains pays qui n’ont pas le matériel adéquat se reposent uniquement sur le contrôle physique. Il en résulte que seule une infime fraction des bagages à l’arrivée peut être contrôlée et, étant donné qu’ils dépendent du jugement personnel des fonctionnaires sur le terrain, les contrôles sont souvent aléatoires et incohérents.
Dans les pays où les scanners sont disponibles, une solution pourrait être d’augmenter le taux de contrôle pour les passagers et leurs effets personnels à l’arrivée. Toutefois, la mise en place de contrôles fréquents à l’aide de scanners traditionnels peut être parfois difficile, occasionner du stress chez les voyageurs et même être dérangeant pour les personnes à besoins spécifiques telles les personnes âgées, à mobilité réduite ou les familles. De longues files au moment du dédouanement peuvent engendrer des goulets d’étranglement et poser des problèmes au niveau opérationnel tout en épuisant les ressources humaines de la douane aux heures de pointe. Enfin, dernier point et non des moindres, la façon traditionnelle de réaliser ces contrôles peut être dangereuse et risquée dans un contexte tel que celui de la pandémie de COVID-19 étant donné que la distanciation sociale est difficile à observer et qu’il est impossible d’éviter les contacts physiques.
Tirer parti des technologies à l’arrivée
Dans les aéroports, la question vitale à laquelle la douane se doit de répondre est : comment trouver un équilibre entre contrôle sécuritaire et facilitation dans un espace restreint ? Afin d’aider la douane à réinventer son approche en matière de contrôle dans un tel environnement, il convient d’avoir recours à des technologies novatrices. Récemment, le monde a été le témoin d’un changement rapide en termes d’avancées technologiques avec l’apparition des scanners (CT) 3 D à haute vitesse, des outils d’analyse pour le big data, des objets connectés capables de recueillir et de transférer des données à l’aide d’un réseau (IoT), des dispositifs automatisés, des systèmes reposant sur l’intelligence artificielle, etc. Tous ces outils offrent de nouvelles possibilités pour répondre et relever les défis de façon proactive.
Ce qui a réellement changé les règles du jeu sont les avancées en matière de technologie d’imagerie et de détection automatisée. Certaines douanes pionnières en la matière en Asie ont adopté des solutions de contrôle à 100 % pour reconfigurer et moderniser de manière créative le processus de contrôle dans les aéroports. Elles ont intégré le rayon-X ou les scanners CT dans leur système de distribution des bagages, permettant ainsi de contrôler 100 % des bagages dans les « coulisses », pendant le processus d’acheminement des bagages. Etant donné que le temps est une contrainte majeure dans cet environnement, les résultats du scanner doivent être analysés rapidement, ce qui peut représenter un défi en l’absence de système de détection automatique. Les scanners équipés de tels systèmes qui permettent de reconnaître des objets peuvent à présent être utilisés pour détecter automatiquement la contrebande et les substances illicites. De cette façon, le contrôle au scanner n’a plus lieu au niveau de la porte de sortie, mais en amont, au niveau du système d’acheminement des bagages et le processus est totalement automatisé et cohérent, et à la fois invisible et non intrusif pour les passagers respectueux des lois.
Lorsqu’ils détectent des marchandises non déclarées ou des produits interdits, les scanners CT envoient automatiquement des messages d’alerte qui permettent d’agir. Une étiquette RFID ou un scellé électronique est attaché aux bagages suspects. Dans la zone de récupération des bagages, le fonctionnaire des douanes peut, à l’aide d’une tablette avec un logiciel de lecture spécifique (applet), identifier le bagage suspect. En analysant l’image et plus particulièrement la zone marquée comme problématique, les fonctionnaires peuvent décider de diriger le bagage suspect pour un contrôle à la sortie. Par ailleurs, s’il n’y a pas d’agent disponible dans la zone de récupération des bagages, des capteurs installés dans la zone de sortie permettront aux fonctionnaires chargés de procéder à la fouille d’identifier tout bagage muni d’un scellé électronique ou d’une étiquette RFID. En résumé, une avancée technologique importante peut améliorer le ciblage des contrôles douaniers dans les aéroports.
Avantages
Réaliser des contrôles sur 100 % des bagages présente une série d’avantages. Pour la douane, cela signifie une augmentation des recettes car elle saisit plus de marchandises taxables, et un renforcement de la sécurité car elle est plus à même d’identifier des marchandises soumises à des restrictions ou interdites. L’efficacité opérationnelle est plus grande et la douane peut optimiser l’affectation de ses ressources humaines, être plus flexible et mieux à même de s’adapter à des situations particulières.
Des avantages existent aussi pour les aéroports. Un processus de contrôle sans complication peut contribuer à ce que les passagers gardent une bonne impression de leur passage et renforcer la compétitivité d’un aéroport en l’aidant à se démarquer par rapport à la concurrence. Pour la plupart des passagers à faible risque, le temps nécessaire au dédouanement sera réduit de moitié et il ne sera plus nécessaire de charger et décharger les bagages sur le tapis roulant du scanner lors d’un contrôle.
Un exemple en Asie
En 2019, la Douane de Thaïlande a adopté une solution de contrôle intelligente, puissante et évolutive reposant sur des technologies modernes et une plateforme de mise en réseau afin de rénover et moderniser le contrôle des passagers à l’arrivée dans certains aéroports. À l’aéroport international de Suvarnabhumi notamment, 23 scanners à rayons-X dotés d’une intelligence artificielle ont été intégrés aux tapis roulants de la zone de chargement des bagages. La vitesse du passage au scanner a été adaptée à la vitesse des tapis roulants, à savoir 0.6m/s, ce qui permet un contrôle à 100 % sans compromettre la cadence, tout en minimisant les changements à apporter à la structure existante. Quarante imprimantes d’étiquettes RFID sont en service pour apposer les étiquettes aux bagages suspects.
Après avoir été déchargés de la soute de l’avion, les bagages sont placés sur l’un des tapis roulant et passent par un scanner à rayons-X avant d’être acheminés vers les carrousels à bagages. Les images scannées sont envoyées à l’un des fonctionnaires de la douane se trouvant dans la salle du traitement central des informations. Si un objet suspect est détecté sur l’image, une étiquette RFID sera apposée sur le bagage ; l’étiquette peut être retirée seulement après que les fonctionnaires ont donné leur autorisation et que le bagage a été dédouané à l’une des sorties de l’aéroport. Au moment où le bagage suspect est étiqueté et chargé sur le carrousel, ou approche les zones de contrôles douaniers, un message est envoyé aux fonctionnaires des douanes les alertant de la nécessité d’une inspection supplémentaire. Les fonctionnaires peuvent ensuite avoir recours à un scanner doté d’une technologie CT plus avancée pour vérifier à nouveau les bagages qui ont une étiquette RFID et procéder à un contrôle physique, le cas échéant.
Des douzaines de capteurs RFID ont été déployés dans les toilettes et dans la zone de récupération des bagages, ainsi que dans les zones de contrôles douaniers. Il serait dès lors impossible pour un bagage ayant été marqué comme suspect d’échapper à l’attention des fonctionnaires des douanes.
Les solutions intelligentes en matière de contrôles douaniers permettent un contrôle à 100 % des passagers à l’arrivée à l’aéroport de Suvarnabhumi sans que cela ne leur pose problème ; parfois les voyageurs ne s’en rendent même pas compte.
Quid de l’avenir
À l’avenir, la douane pourrait directement visualiser au cours d’un contrôle physique non seulement l’image du bagage scanné mais également les informations spécifiques aux passagers, via un système d’échange d’informations avec les lignes aériennes. Elle pourrait avoir accès, par exemple, à des informations figurant sur l’étiquette du bagage, aux données du Dossier Passager (PNR), aux informations figurant sur le billet d’avion et aux données biographiques des documents de voyage. Elles pourraient également visualiser cette information grâce à des dispositifs de réalité augmentée (lunettes).
Le système alerterait les fonctionnaires sur le terrain lorsqu’un passager portant un bagage suspect s’approcherait de la zone de contrôle de la douane. Les fonctionnaires pourraient avoir accès aux informations relatives aux passagers simultanément et prendre des décisions de manière efficace en toute connaissance de cause.
La mise en œuvre de tels processus et dispositifs peuvent bien évidemment constituer un défi, mais les avancées technologiques mènent la douane vers un futur où le contrôle des passagers à l’arrivée se fera rapidement et de manière conviviale.
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