Photo: Département ukrainien de la formation spécialisée et des services cynophiles

Focus

La formation au temps de la COVID-19 : l’expérience de l’Ukraine

21 octobre 2020
Par Andrii Voitseshchuk, directeur par intérim du Département de la formation spécialisée et des services cynophiles, Service national des douanes d’Ukraine

L’Ukraine a proclamé son indépendance le 24 août 1991. Peu après, elle créait son propre service des douanes. Comme toute nouvelle organisation, son défi était de trouver des spécialistes hautement qualifiés et, par conséquent, l’accent a été mis sur la formation des nouvelles recrues. Les autorités ont en outre adopté une loi exigeant des agents des douanes qu’ils améliorent constamment leur niveau de compétence professionnelle.

Le Département de la formation spécialisée et des services cynophiles (ci-après dénommé « le Département ») a été créé pour dispenser une formation à distance et en présentiel au moyen des outils et méthodes les plus récents. Pour ce faire, il fait appel à des formateurs expérimentés. Sur les 69 agents que compte le Département, six sont candidats ès sciences[1], un autre est docteur ès sciences[2], douze sont des agents des douanes expérimentés, dix sont des linguistes, huit sont des formateurs experts certifiés par une organisation internationale, un autre encore est un expert reconnu de l’OMD et trois sont des experts accrédités de l’OMD[3].

Les séances de formation sont axées sur l’application de techniques de travail modernes et des normes de l’OMD dans les domaines suivants : évaluation, origine, classification, promotion et protection des droits de propriété intellectuelle, fraude fiscale, contrôle du transit, mise en œuvre de technologies liées aux inspections, et lutte contre le commerce illicite et la contrebande.

En outre, le Département sélectionne et forme des chiens et des équipes cynophiles, gère la logistique et l’infrastructure du Centre de formation cynophile (chenils, véhicules et outils de formation utilisés), assure la participation des équipes ukrainiennes de maîtres-chiens à des événements spéciaux et coopère avec d’autres organismes aux niveaux international et national en vue d’un partage de connaissances et de pratiques et pour venir en appui aux opérations de lutte contre la fraude.

Le Département est également chargé d’organiser des activités sous l’égide de l’OMD, en tant que centre régional de formation de l’OMD et centre régional de formation cynophile.

Besoins en formation

Le calendrier des séances de formation est établi chaque année avec le département des ressources humaines, dans le cadre du plan annuel de développement des compétences professionnelles. On détermine les besoins en formation grâce à différentes méthodes :

– On analyse les résultats de l’enquête de fin de formation effectuée après chaque activité. Entre autres choses, les participants doivent citer les domaines de travail dans lesquels ils ont besoin d’améliorer leurs connaissances.

– On examine la stratégie du Département, en s’intéressant notamment aux nouveaux objectifs, aux priorités et aux changements organisationnels.

– On consulte les différentes divisions du Service national des douanes.

Une liste de sujets et des projets de programmes de formation sont ensuite établis et soumis pour approbation. Les participants aux séances de formation prévues sont ensuite choisis en fonction des besoins qu’ils ont exprimés et de l’évaluation de leur travail. Il y a une certaine souplesse dans le processus, et la liste des séances de formation prévues peut être ajustée en cours d’année suivant les circonstances.

Passage total au numérique

La pandémie de COVID-19 a transformé les méthodes de formation puisque toutes les activités de formation sont désormais organisées exclusivement à distance. Ce changement a été difficile pour tous les établissements d’enseignement, étant donné qu’il n’est pas facile de concevoir une formation de qualité à l’aide des technologies numériques. En outre, les formateurs doivent travailler dur pour inspirer et motiver les agents et résoudre les problèmes techniques rencontrés par les participants.

Le Département est parvenu à s’adapter rapidement à la situation actuelle grâce à sa plateforme d’enseignement à distance, au professionnalisme et à l’énergie de son équipe de formateurs ainsi qu’à l’expérience qu’il avait déjà acquise dans la formation en ligne. Après tout, près de 80 % de la formation était déjà dispensée sous une forme mixte de formation en ligne et en présentiel, combinant à la fois des cours asynchrones (où les concepteurs créent des cours que les participants peuvent suivre seuls, avec peu ou pas d’aide d’un instructeur) et des cours synchrones (formation dirigée par un instructeur qui exige que celui-ci et ses étudiants soient présents à des heures prévues, en personne ou en ligne, pour les cours, les discussions et les activités). Tous les cours comprennent des exercices pratiques fondés sur des cas élaborés par des formateurs car une attention considérable a été accordée aux éléments pratiques qui permettent aux participants de consolider les connaissances acquises au cours des formations théoriques.

Lorsque la pandémie a frappé, le Département s’est essentiellement attaché à organiser le processus pédagogique de manière à ce que la qualité offerte par les nouvelles formes de formation soit similaire, sinon supérieure à celle des formes traditionnelles.

Aujourd’hui, l’enseignement asynchrone est utilisé comme avant : les formateurs fournissent aux apprenants des liens vers des enregistrements vidéo de conférences et divers documents, et les apprenants suivent la formation par eux-mêmes. Quant à l’enseignement synchrone, il est désormais dispensé exclusivement au moyen d’un logiciel de conférence Web gratuit appelé BigBlueButton. Ce système permet le partage en temps réel de présentations et d’écrans entre les participants, qui peuvent également collaborer et créer du contenu au moyen de tableaux blancs, de notes partagées, d’outils de dessin et de sondages.

Cette nouvelle modalité de formation mixte en ligne a déjà été utilisée dans de nombreux domaines, y compris la formation des équipes cynophiles à la recherche de stupéfiants, d’armes et de munitions, de produits du tabac, de billets de banque, d’ambre et de marchandises relevant de la CITES.

Les cours dans ce domaine particulier ont été répartis en trois phases :

  • Phase I : les participants ont travaillé individuellement sur des cours théoriques enregistrés et d’autres supports pédagogiques, y compris des tests.
  • Phase II : les formateurs du Département ont dispensé des cours en ligne sur des sujets tels que la réglementation relative aux stupéfiants et aux procédures qui s’y réfèrent, l’utilisation conjointe de systèmes de balayage et d’équipes cynophiles pour détecter les marchandises interdites, et la composition du service vétérinaire qui s’occupe des chiens détecteurs. Les équipes cynophiles ont ensuite réalisé des exercices pratiques de recherche portant sur divers articles et substances, sur la base de scénarios mis en scène dans différents locaux et installations. Ces exercices ont été filmés et les fichiers vidéo envoyés au Département.
  • Phase III : les formateurs ont corrigé les tests, regardé les fichiers vidéo et évalué les performances des participants sur la base de critères prédéfinis.

Une attention particulière a en outre été accordée à la formation des opérateurs de petits systèmes de balayage. Pour la première fois, le Département a donné en ligne un cours de formation des formateurs sur l’analyse d’images radiologiques à l’aide de Simfox, un simulateur de rayons X. Simfox utilise des images réelles et comprend un écran figurant le panneau de commande d’une machine à rayons X. Cette réplique offre les mêmes fonctions d’optimisation et d’agrandissement de l’image que la machine utilisée sur le terrain.

Pendant la pandémie, le Département a également continué à promouvoir la plateforme d’apprentissage en ligne CLiKC! de l’OMD. Quelque 392 douaniers ukrainiens utilisent la plateforme depuis le début de 2020, contre 106 l’année précédente.

Des conférences vidéo ont été créées sur tout un éventail de nouveaux sujets, et notamment :

  • l’adaptation aux normes de l’Union européenne de la législation nationale relative aux droits de propriété intellectuelle ;
  • l’entreposage des marchandises et véhicules sous contrôle douanier et les entrepôts temporaires ;
  • les droits de l’homme ;
  • les techniques de résolution de conflits ;
  • l’évaluation psychodiagnostique des personnes prédisposées à commettre des infractions douanières ;
  • la gestion des équipes.

Défis à relever et enseignements tirés

À ce jour, 1 385 agents ont été formés. D’après les retours exprimés après chaque formation en ligne, 90 % des participants considèrent que le processus pédagogique est intéressant, utile, informatif, très innovant et pertinent pour leur travail quotidien.

Toutefois, les participants relèvent aussi certains points négatifs souvent attribués à l’enseignement à distance, tels que les difficultés ou les limites s’agissant des échanges avec le formateur et les autres participants. Les formateurs ont, quant à eux, eu du mal à convertir au format en ligne les ateliers et conférences sur des sujets tels que les objets culturels, la protection des droits de propriété intellectuelle et l’utilisation de la psychologie pour comprendre et prédire les comportements.

Bien que l’enseignement à distance ne soit pas un phénomène nouveau (en effet, les cours par correspondance existent dans le monde depuis les années 1700), l’émergence d’outils coopératifs, le développement de la pédagogie en ligne et les possibilités offertes par la technologie s’agissant d’adapter l’apprentissage aux besoins individuels et d’étudier comment les personnes apprennent transforment le processus de formation. Le grand défi que doivent aujourd’hui relever tous les établissements de formation est d’exploiter les nouvelles solutions et méthodes d’enseignement à distance, et nous encourageons ceux qui souhaitent en savoir plus sur notre expérience à nous contacter et à nous rendre visite dès que les conditions le permettront.

En savoir +
ds.post@customs.gov.ua
https://www.facebook.com/dspkz.dmsu

[1] L’obtention d’un diplôme de candidat ès sciences requiert en principe au moins trois années d’études supérieures dans un établissement d’enseignement supérieur de niveau universitaire.

[2] Le doctorat ès sciences peut être obtenu après des études complémentaire suivant l’obtention du diplôme de candidat ès sciences.

[3] Un expert reconnu n’a pas forcément reçu une accréditation officielle de l’OMD, mais il doit posséder une expérience et une expertise avérées dans un domaine particulier.