Panorama

Les efforts soutenus de la Serbie pour protéger son patrimoine culturel

20 juin 2018
Par la Douane serbe

Il est un fait bien connu que, partout en Serbie, des chasseurs de trésors et marchands d’antiquités fouillent et détruisent les sites historiques du pays pour en extraire des objets culturels de valeur, qui finissent dans les ventes aux enchères ou dans les foires d’antiquités en Occident, où ils se vendent à des prix certes très élevés mais bien en-dessous de leur véritable valeur tant pécuniaire que culturelle. Ce phénomène ne se circonscrit malheureusement pas à la Serbie. La contrebande d’objets d’art et d’antiquités est considérée comme l’une des formes les plus lucratives de contrebande et les saisies de biens culturels augmentent partout dans le monde, ce qui pourrait témoigner d’une amplification du phénomène.

Compte tenu de l’importance du patrimoine culturel pour les sociétés et les économies des pays, et étant donné qu’une partie des bénéfices obtenus illégalement à travers le trafic d’œuvres d’art et d’antiquités finance souvent la criminalité organisée, voire le terrorisme, l’Administration des douanes de Serbie s’est lancée dans une lutte acharnée contre ce phénomène. Les efforts de la Serbie à cet égard sont particulièrement pertinents cette année, 2018 étant l’Année européenne du Patrimoine culturel. L’Union européenne, qui choisit de mettre en lumière un sujet particulier chaque année afin d’encourager le débat et le dialogue au sein de ses États membres et de leurs entourages, souhaite encourager davantage de personnes à découvrir le patrimoine culturel de l’Europe et à s’engager pour sa défense, dans le but de renforcer ainsi le sentiment d’appartenance à un espace européen commun.

Renforcement des capacités

La Serbie représente le plus souvent un pays d’origine ou de transit pour les biens culturels, objets d’art et antiquités passés en contrebande, mais généralement pas leur destination finale. Les contrebandiers d’art cherchent à faire entrer leur butin dans des pays européens spécifiques, où ils peuvent trouver un marché pour ces types de marchandises.

La Douane de Serbie s’efforce de renforcer ses capacités pour protéger son patrimoine culturel depuis quelque temps déjà. En 2006, elle avait élaboré ses « Directives pour l’identification et l’évaluation des antiquités et objets rares ». Ce manuel, au contenu détaillé et riche en matériel photographique, propose des méthodes pour établir la valeur approximative des antiquités et autres objets rares et décrit plusieurs moyens utilisés pour les faire passer illégalement à travers les frontières. Il couvre les papiers et livres anciens, les gravures, les antiquités, les meubles anciens, les bijoux et objets décoratifs précieux, les pierres précieuses, les articles d’horlogerie, les pièces de monnaie anciennes, les peintures, les icônes anciennes et plus encore.

Par ailleurs, les douaniers serbes participent régulièrement à des exercices et à des ateliers de formation sur une série de sujets liés à la lutte contre le trafic illicite de biens culturels ainsi que sur des questions connexes comme la restitution ou le retour des objets culturels ou encore les mesures de prévention et d’atténuation des risques. En novembre 2017, un tel atelier avait notamment été organisé par le Bureau régional pour la science et la culture en Europe de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), en collaboration avec la Police italienne.

Coopération

Au niveau national, l’Administration des douanes de Serbie coopère avec le Ministère de la culture et de l’information, avec l’Institut pour la protection des monuments culturels, la Bibliothèque nationale ainsi qu’avec d’autres services du Ministère de l’intérieur, en particulier le Service de lutte contre le crime organisé. À travers le Ministère de l’intérieur, la Douane de Serbie entretient également une bonne coopération avec le Bureau du Procureur général et avec le Procureur spécial chargé de la lutte contre le crime organisé, sans oublier l’Office européen de police (EUROPOL) et INTERPOL.

L’Administration des douanes a également établi des mécanismes de coopération avec d’autres autorités douanières, sur la base des accords signés avec ces dernières. Toujours en matière de coopération, la Douane de Serbie participe activement aux opérations régionales ou internationales ciblant les biens culturels, comme ODYSSEUS, AUREUS et PANDORA.

Pour ce qui a trait aux échanges réguliers de données au niveau international, INTERPOL représente une source première de renseignements sur les objets revêtant une importance particulière au titre du patrimoine culturel.  Outre les informations de base sur les objets, l’Administration de la douane reçoit également les photographies des objets, ce qui facilite leur identification. Ces informations sont d’abord traitées par le Département du renseignement douanier, qui les transfère à tous les services et bureaux de douane, dont le Département de lutte contre la contrebande.

Enfin, les renseignements sur les saisies de biens culturels sont partagés avec les autres services douaniers par le biais de la plateforme ARCHEO, outil de communication en temps réel de l’OMD pour l’échange d’informations et la coopération aux fins de la protection du patrimoine culturel. Les renseignements rapportés par les autres administrations sur la plateforme permettent aux fonctionnaires serbes chargés de la lutte contre la fraude d’en apprendre plus sur les nouvelles méthodes de contrebande et les cas considérés comme les plus intéressants sont partagés avec tous les employés de la Douane. Il est de la plus haute importance que les autorités douanières partagent de telles informations par le biais de la plateforme afin de renforcer les capacités de tous en matière d’analyse des risques.

Résultats

Sur la base des informations disponibles, il apparaît aujourd’hui que les contrebandiers utilisent avant tout leurs véhicules personnels pour la contrebande d’œuvres d’art et d’antiquités, les voitures étant souvent converties et modifiées afin de répondre aux besoins de leurs activités illicites. Ils recourent également aux conducteurs de bus, en leur confiant les objets à transporter, ou encore à des personnes voyageant fréquemment dans les pays d’Europe occidentale.

En 2017, par exemple, deux évangiles du XVIIème et du XVIIIème siècle ont été retrouvés dans les bagages d’un passager voyageant à bord d’un bus et, plus tôt dans l’année, les douaniers au poste-frontière de Gradina ont découvert des pièces de monnaie et des parchemins en arabe, en passant au scanner la roue de rechange d’un véhicule.

D’autres pièces antiques, emballées dans du vieux papier journal et dans des sacs en plastique, ainsi que le buste en bronze d’un légionnaire romain et une figurine de taureau en fonte ont également été retrouvés cachés sous le siège du conducteur, dans l’accoudoir et derrière le siège arrière du véhicule au poste-frontière de Batrovci.

D’autres tentatives de contrebande d’icônes particulièrement importantes pour l’Église orthodoxe d’Orient ont été déjouées. Au poste-frontière de Gradina, par exemple, début 2015, des douaniers ont découvert deux icônes orthodoxes cachées parmi les bagages d’une remorque de véhicule en route vers l’Europe occidentale. Ils ont ainsi empêché que ces objets religieux irremplaçables ne soient à jamais perdus pour les pays et les communautés qui les gardent pourtant précieusement.

Les défis

L’Administration des douanes de Serbie constitue la dernière ligne de défense contre cette dégradation de notre précieux patrimoine culturel et elle est devenue un puissant adversaire pour les contrebandiers de tout poil. Toutefois, afin de renforcer encore davantage la capacité de la Douane de Serbie à protéger son patrimoine culturel, l’Administration a relevé qu’il était essentiel :

  • d’établir un mécanisme d’action commune détaillant le rôle et les procédures de toutes les autorités et institutions concernées (Ministère de la culture et de l’information, Ministère de l’intérieur, Ministère des finances – Administrations des douanes, Ministère de la justice et bureau du Procureur général) à tous les niveaux (local, régional, national et international) et d’instituer un régime d’échange de renseignements et des points de contact dans chacun de ces services ;

 

  • d’instaurer des groupes de travail permanents intersectoriels qui pourraient débattre et proposer des solutions sur différents points (élaboration de projets de plans d’action, amendements aux règlementations, introduction d’une base de données, coordination et assistance pour les cas de vol, de contrefaçon, de trafic illicite, de dommages et de destruction du patrimoine culturel).

 

  • d’établir des départements chargés spécifiquement du patrimoine culturel national au sein du Ministère de la culture et de l’information, et de créer en leur sein des services d’inspection pour la protection du patrimoine culturel national avec toutes les compétences nécessaires ;

 

  • de mettre sur pied une base de données numérique nationale sur les biens culturels et de cataloguer numériquement les objets culturels relevant de la propriété de l’Église (outre les données sur l’objet en soi et ses photographies numériques, il conviendrait d’ajouter des informations détaillées sur la façon dont les objets sont entreposés et l’endroit où ils sont gardés) ;

 

  • d’élaborer une carte de terrain, avec les coordonnées géographiques des sites et les données détaillées de la distribution et de la concentration des biens culturels mobiliers et immobiliers, qui pourrait être mise à la disposition du public, sous certaines conditions – une telle carte présentant de nombreux avantages, notamment pour l’évaluation des risques de catastrophe naturelle ou d’autres incidents et pour la définition de plans d’évacuation du patrimoine dans de telles circonstances ;

 

  • d’autoriser les employés des musées à offrir leur aide et leur expertise aux douaniers et aux officiers de police aux postes-frontières, afin de les assister dans l’identification et l’évaluation d’objets pour lesquels il existe un soupçon de trafic illicite ou de contrebande de patrimoine culturel.

Action continue

Compte tenu du fait que le patrimoine culturel a une valeur universelle pour tous et consciente de l’importance de préserver cet héritage pour les générations futures, l’Administration des douanes de Serbie est déterminée à continuer de faire barrage aux contrebandiers autant que possible. Son action continue en matière de répression et de lutte contre la fraude ainsi que les autres efforts nationaux qui viennent la compléter pour protéger le patrimoine culturel ne pourront qu’aboutir à des résultats probants dans la lutte contre ce commerce illicite.

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ocucs@carina.rs