Dossier

Le modèle australien de perception par le fournisseur expliqué

21 février 2019
Par le Ministère de l’intérieur australien

L’essor du commerce électronique a contribué à une augmentation significative des volumes de marchandises qui franchissent les frontières australiennes. Entre 2013 et 2016, le volume du fret aérien entrant et des colis postaux internationaux a augmenté de 57 %. L’Australie s’attend, entre 2017 et 2021, à une croissance annuelle du fret aérien de 30 % et à un doublement du nombre de colis postaux internationaux.

Le succès des achats en ligne tient, entre autres choses, au fait que les marchandises d’une valeur égale ou inférieure à 1 000 dollars australiens, dites « marchandises importées de faible valeur », étaient, jusqu’au 1er juillet 2018, exemptées de la taxe sur les biens et services lors de leur importation. À mesure que le commerce sur Internet s’est développé, les effets de cette exemption ont suscité de plus en plus de préoccupations. La multiplication des importations directes, par les consommateurs, de marchandises de faible valeur a suscité des inquiétudes quant au désavantage concurrentiel pour les détaillants australiens, à la neutralité fiscale et à la perte de recettes[1].

Après dix ans de débats et plusieurs études commandées par les pouvoirs publics, le Council of Australian Governments (COAG), une instance intergouvernementale, a décidé en 2015 d’étendre la taxe sur les biens et services aux marchandises importées de faible valeur et, en 2017, le gouvernement australien a adopté à cette fin un amendement à la loi sur le trésor public.

Quelles mesures législatives ont été prises ?

La question essentielle portait sur le modèle de perception de la taxe qu’il fallait utiliser. L’organisme de recherche et de consultation indépendant du gouvernement australien, la Commission de la productivité, a été chargée d’étudier la question et a publié le 31 octobre 2017 un rapport sur les modèles de perception de la taxe sur les biens et services sur les marchandises importées de faible valeur.

La taxe sur les biens et services est une composante du droit fiscal australien, administrée par le ministère australien du trésor public et l’office des impôts australien (ATO). Le choix du modèle de perception à adopter était donc entre les mains de ces deux autorités. Conformément aux recommandations de la Commission de la productivité, elles ont choisi le modèle de perception par le fournisseur en vertu duquel ce sont les vendeurs étrangers qui ont la responsabilité de facturer, percevoir et reverser la taxe. Le modèle permet d’améliorer la neutralité fiscale entre les marchandises de faible valeur qui sont importées et celles qui sont vendues au détail sur le marché intérieur, et devrait avoir un impact minimal sur les consommateurs qui importent ces marchandises[2]. Autre avantage : ses coûts d’administration sont faibles.

Cela étant, il peut être difficile de faire respecter les règles par des entreprises qui mènent leurs activités à l’étranger. Face à ce défi, l’ATO recoupe les données, mène des enquêtes, reçoit des renseignements de l’industrie et du public, et utilise les données sur les importations.

Quels autres modèles ont été envisagés ?

L’Australie a envisagé d’autres possibilités :

  • le modèle de perception traditionnel, à la frontière, qui est le modèle utilisé actuellement pour la perception de la taxe sur les biens et services, les droits de douane et d’autres taxes indirectes sur les importations d’une valeur supérieure à 1 000 dollars australiens, mais les coûts administratifs et le coût de conformité étaient largement supérieurs aux recettes possibles ;
  • le modèle de perception par le transporteur, en vertu duquel l’agent de livraison perçoit la taxe sur les biens et services auprès de l’importateur avant de la reverser, mais les coûts administratifs et la lourdeur de la mise en œuvre rendaient ce modèle irréaliste ;
  • le modèle de perception par l’intermédiaire financier, qui placerait la responsabilité légale de la perception de la taxe sur les biens et services sur les entités établies en Australie, mais les systèmes de paiement actuels ne recueillent pas assez d’informations pour évaluer l’assujettissement à la taxe sur les biens et services.

La Commission de la productivité est arrivée à la conclusion que le modèle de perception par le fournisseur était le mieux adapté au contexte australien. Ce modèle est d’ailleurs une adaptation de l’approche qu’adopte le gouvernement australien pour percevoir la taxe sur les biens et services sur les fournitures à l’étranger de services et de produits numériques aux consommateurs australiens.

Comment cela fonctionne-t-il ?

On notera que, dans le cadre du modèle australien, la taxe sur les biens et services n’est pas facturée au point d’importation : elle s’applique au point de vente sur toutes les marchandises importées de faible valeur (à l’exclusion de l’alcool et des produits du tabac qui sont traités séparément).

Un consommateur australien achète des marchandises en ligne sur un marché étranger, auprès d’un commerçant, d’une plateforme de vente ou d’un opérateur d’expédition. La transaction s’effectue en ligne et la taxe sur les biens et services est perçue par le fournisseur au passage à la caisse, pour autant que la valeur des marchandises soit égale ou inférieure à 1 000 dollars. Le fournisseur envoie ensuite les marchandises au consommateur et remplit une déclaration de dédouanement. Il reverse en outre la taxe à l’ATO. À la frontière, la police australienne des frontières peut inspecter les marchandises pour s’assurer qu’elles sont conformes aux exigences générales d’importation. Si aucune autre mesure n’est requise sur le plan douanier, les marchandises sont envoyées au consommateur.

Le modèle de perception par le vendeur exige que les fournisseurs, les plateformes de vente et les opérateurs d’expédition s’inscrivent auprès de l’ATO. En vertu du modèle prévu par la loi, seuls les fournisseurs étrangers dont les ventes imposables à des consommateurs établis en Australie atteignent ou dépassent 75 000 dollars par an doivent percevoir et reverser la taxe sur les biens et services. Toutefois, les plateformes de vente qui facilitent des ventes imposables vers l’Australie pour une valeur supérieure à 75 000 dollars sont tenues de percevoir la taxe sur les biens et services sur toutes les ventes de marchandises de faible valeur effectuées sur leur plateforme, y compris les ventes réalisées par des vendeurs qui vendent pour moins de 75 000 dollars.

Comment les fournisseurs étrangers ont-ils été associés à la démarche ?

Pour mettre en œuvre ce changement qui touche des entités qui font affaire avec des clients en Australie depuis le monde entier, l’ATO a dû repenser ses modes de fonctionnement. Il a associé au travail de conception du modèle des acteurs mondiaux de la comptabilité, des transporteurs, des courtiers en douane et des organismes représentatifs, tels que des associations professionnelles.

L’ATO a en outre coorganisé plusieurs webinaires à l’intention des entreprises étrangères, dont une présentation en chinois qui a réuni plus de 2 000 participants. Toutes les grandes plateformes et tous les principaux fournisseurs sont d’ailleurs à présent inscrits sur le registre de l’ATO.

Défis et avantages

Deux défis principaux ont été identifiés. Le premier tient au fait que les systèmes de paiement utilisés par les opérateurs ont dû être modifiés de façon à pouvoir recueillir les renseignements nécessaires, collecter la taxe et identifier les fournisseurs inscrits. Le deuxième a trait à l’éducation des petits fournisseurs étrangers s’agissant de l’application, de la perception et du reversement de la taxe.

Les avantages sont tout de même conséquents : la perception de la taxe au point de vente plutôt qu’à la frontière permet de ne pas perturber les flux commerciaux, ce qui réduit les coûts de conformité et d’administration, et les organismes chargés des frontières et les transporteurs peuvent ainsi se concentrer sur les activités clés. Plus important encore, les entreprises australiennes bénéficient de règles du jeu équitables.

Et maintenant ?

Le nouveau modèle n’en est encore qu’à ses débuts et sera examiné en 2023. Cet examen portera sur l’efficacité du modèle prévu par la loi ; les taux de conformité et, s’ils ne sont pas viables, la façon de les améliorer ; et la question de savoir si un autre modèle de perception, compte tenu des progrès technologiques et de l’évolution des politiques, pourrait être plus avantageux pour l’Australie.

En savoir +
www.abf.gov.au
www.ato.gov.au

[1] Rapport d’enquête no 86 (2017) de la commission de la productivité, consacré aux modèles de perception de la taxe sur les biens et services sur les marchandises importées de faible valeur, p. 17.

[2] idem, p. 13.